‘'Lucide'' pour les uns, ‘'irréaliste'', voire ‘'simpliste'' pour d'autres, le rapport ne semble pas faire l'unanimité tant en Irak, en Israël qu'aux Etats-Unis. Très attendu, le rapport du Groupe d'études sur l'Irak, rendu public mercredi à Washington, ne semble pas avoir fait l'unanimité dans les milieux politiques américains et moyens-orientaux, les uns comme les autres, critiquent vertement certaines de ses recommandations. Curieusement, et pour des raisons très différentes, Israéliens, Kurdes irakiens et la Ligue arabe rejettent autant les recommandations du rapport que l'approche avec laquelle la commission Baker-Hamilton s'est penchée sur le dossier irakien. En revanche, les Palestiniens ont exprimé leur satisfaction du fait que le rapport fait un lien clair entre la situation prévalant en Irak, -appelée à se dégrader davantage dans les prochains mois et/ou semaines, selon la commission Baker, et le conflit israélo-palestinien dont la persistance constitue de son côté, un danger pour toute la région du Moyen-Orient. Le rapport évoque aussi, c'est une première, la nécessité du retour des réfugiés palestiniens, point qui constitue le noeud gordien dans les négociations israélo-palestiniennes. De fait, l'administration républicaine semble avoir pris en compte cet aspect du rapport, le président américain George W.Bush, confiant à son principal allié, le Premier ministre britannique, Tony Blair, la mission de prendre en charge le dossier proche-oriental et de tenter de relancer le processus de paix au Proche-Orient, en panne depuis de nombreuses années. De fait, parmi ses 79 propositions, soumises mercredi au président Bush, la commission Baker-Hamilton excipe d'une initiative diplomatique pour résoudre le conflit israélo-palestinien, qui entre dans sa soixantième année. Dans cette perspective, il est prévu que M.Blair effectue une tournée au Proche-Orient d'ici à la fin du mois, précédant de peu la secrétaire d'Etat, Condoleezza Rice qui prévoit de se rendre dans la région au début de janvier 2007. Même s'il ne compte pas prendre en compte l'ensemble des recommandations préconisées, le président Bush a admis néanmoins que «ça va mal en Irak» et de convenir «je crois que nous avons besoin d'une nouvelle approche». Toutefois, si M.Bush admet qu'il faut imaginer une nouvelle politique et stratégie pour l'Irak, il refuse cependant de baisser la garde face à l'Iran, qu'il considère comme l'une des causes du «chaos» au Moyen-Orient. De fait, si l'administration Bush estime certains points du rapport positifs, d'autres le semblent moins et M.Bush se réserve de les intégrer ou non dans sa nouvelle stratégie sur l'Irak. Sans surprise, Israël a rejeté les recommandations de la Commission Baker-Hamilton, notamment pour ce qui est de la résolution du contentieux israélo-palestinien. Israël, qui a toujours refusé une paix juste et global au Proche-Orient (ce qui sous-entend le retrait de l'ensemble des territoires palestiniens occupés, la résolution de la question des réfugiés), montre ainsi qu'il n'a jamais été prêt pour une paix véritable. Selon le Premier ministre israélien, Ehud Olmert, qui conteste qu'il y ait un lien entre les affaires irakienne et palestinienne: «Le rapport ne reflète pas la position des Etats-Unis mais une opinion aux Etats-Unis. C'est avant tout une affaire intérieure américaine», et d'ajouter: «Pour ce qui est d'établir un lien entre le dossier irakien et le dossier moyen-oriental, nous avons une opinion différente et, autant que je sache, le président Bush a eu aussi, durant ces dernières années, une opinion différente.» Le chef du gouvernement israélien estime, d'autre part, que les «problèmes américains en Irak sont entièrement indépendants du conflit qui nous oppose aux Palestiniens». Contrairement aux Israéliens, les Palestiniens ont bien accueilli un rapport qui, pour la première fois, évoque la question des réfugiés palestiniens et leur retour. Selon Nabil Abou Roudeina, conseiller et porte-parole du président Abbas, «Ce rapport a bien diagnostiqué les choses». «Un règlement du problème palestinien ouvrira la voie au règlement de tous les problèmes au Proche-Orient», a-t-il ajouté., et de conclure: «Toute solution doit commencer en Palestine». De son côté, le Hamas a émis l'espoir que le rapport servira d'instrument pour «résoudre la question palestinienne». Dans une réaction rendue publique hier, la Ligue arabe a dit son «étonnement» quant aux conclusions du rapport Baker-Hamilton, indiquant que le rapport du Groupe d'études sur l'Irak «passe outre aux droits du peuple irakien». «La Ligue arabe se déclare étonnée que le rapport Baker-Hamilton passe outre aux droits du peuple irakien et se limite (...) à sauver la face de l'administration américaine», a déclaré le responsable du dossier irakien auprès de l'organisation, Ali Al-Jarouche, cité par l'agence de presse Mena. Selon lui, «la Ligue arabe ne s'attend pas à ce que le rapport apporte grand-chose, la commission (qui l'a rédigé) étant consultative et le document n'étant pas contraignant». En Irak, silence radio, le gouvernement «étudie» le rapport et n'a toujours pas réagi hier en fin de journée. Toutefois, le président du Kurdistan irakien, Massoud Barzani, trouve «irréaliste et inapproprié» le rapport de la commission Baker-Hamilton.