Un nouveau pas vient d'être franchi dans le dossier du nucléaire iranien avec l'annonce faite hier par les 27 pays de l'Union européenne de « mettre en œuvre dans leur intégralité et sans délai » les sanctions adoptées à l'Onu suite au refus iranien de suspendre le programme d'enrichissement de son uranium. La résolution 1737 adoptée en décembre dernier par le Conseil de sécurité de l'Onu doit être « strictement appliquée », a déclaré hier le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, à Bruxelles. Les sanctions décidées par le Conseil de sécurité portent sur l'interdiction de toutes les exportations de matériels et technologies liés aux activités nucléaires et balistiques ainsi que le gel des avoirs et la restriction des voyages à l'étranger des responsables iraniens en charge du programme nucléaire iranien. Des sources européennes indiquent que ces sanctions pourraient intervenir dans les tout prochains jours. Les ministres européens des Affaires étrangères, réunis hier à Bruxelles, ont cependant laissé la porte ouverte au dialogue dans leur déclaration à l'issue de leur rencontre réitérant leur « attachement » à l'offre « globale » de coopération que le Haut représentant, Javier Solana, a présentée en juin 2006 à l'Iran pour une « solution négociée » en échange d'un gel des activités d'enrichissement d'uranium par l'Iran. Les iraniens, qui ont accueilli cette nouvelle comme une déclaration de guerre de la part de l'Union européenne, ont vivement réagi hier en annonçant par la voix du chef de la commission du parlement pour la Sécurité nationale, Allaeddin Boroudjerdi, en interdisant l'accès sur son territoire à 38 inspecteurs de l'Agence internationale pour l'énergie atomique (AIEA). La riposte iranienne aux pressions européennes et américaines, qui ne signifie pas pour autant une rupture de la coopération entre Tehéran et l'AIEA ni un renoncement par l'Iran de ses engagements vis-à-vis du Traité de non-prolifération (TNP), se veut tout aussi ferme et intransigeante que les positions tranchées des Européens et des Américains sur ce dossier qui est devenu l'un des axes majeurs de leur politique étrangère et de défense. De représailles en contre-représailles, le dossier du nucléaire iranien, qui reste pour l'heure contenu dans des limites conventionnelles, risque de connaître des développements graves dont personne ne pourra prédire l'issue si une solution politique acceptable par les deux parties n'est pas trouvée. En visite à Paris jeudi dernier, le directeur de l'AIEA, Mohammed El Baradei, n'a pas caché son inquiétude sur les conséquences qui résulteraient des sanctions de l'ONU, évoquant les risques d'« escalade ». L'Iran se prépare déjà au pire. L'Iran est prêt à parer toute menace militaire de l'étranger, a déclaré hier un commandant du corps d'élite des Gardiens de la révolution qui a entamé des exercices militaires. Les forces armées iraniennes qui sont de facto en état d'alerte suite aux pressions exercées sur Tehéran ont annoncé hier l'expérimentation dans le cadre de ces manœuvres militaires de nouveaux missiles d'une portée de plus de 350 km. Le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, qui a réussi jusqu'ici à mobiliser l'opinion sur le dossier nucléaire, aura bien du mal à maintenir le cap suite à la colère grandissante de la population et de l'opposition qui ont multiplié ces derniers jours les attaques contre son gouvernement et les contre-performances de son programme économique. L'isolement dans lequel l'Iran se trouve aujourd'hui du fait de son programme nucléaire apparaît de plus en plus contesté de l'intérieur même du régime où la voie de la confrontation avec l'AIEA dans laquelle s'est engagé l'Iran ne semble plus faire l'unanimité au niveau des hautes sphères dirigeantes.