La délégation mixte du PAM et du HCR qui a entamé une visite d'une semaine en mission d'évaluation de la crise alimentaire qui sévit dans les camps des réfugiés sahraouis, à Tindouf, est repartie, mercredi, laissant les réfugiés sur leur faim. Face à une situation qu'elle a, elle-même, qualifiée de « très critique », cette mission s'est attardée à évaluer ses propres activités du passé au moment où celle-ci devrait réagir d'urgence par une assistance humanitaire en faveur de la population des réfugiés sahraouis guettée par la famine. « C'est une mission conjointe du PAM et du HCR d'évaluation de nos activités du passé (…) Nous avons fait des recommandations et des réajustements pour les activités de l'année à venir », nous a déclaré, à son départ de Tindouf, l'administrateur du programme alimentaire mondial (PAM), Mme Nicole Steyer. Cette dernière a pourtant reconnu que « les réfugiés ont besoin d'une assistance alimentaire et non alimentaire ». « Ils n'ont pas d'activités qui peuvent subvenir à leurs besoins et la communauté internationale doit continuer à les assister », a-t-elle ajouté. Mme Steyer a souligné que « cette mission a pour objectif, sur la base des observations et des recommandations que nous voulons faire, de préparer un nouveau programme d'assistance alimentaire et non alimentaire pour les réfugiés ». Et de préciser que ce programme devrait commencer, en principe, à partir du mois d'avril. L'administrateur, qui copréside la délégation, refuse d'admettre qu'il y a une situation de blocage actuel des aides en faveur des réfugiés sahraouis. « L'assistance alimentaire est en train d'être acheminée sur Tindouf. une partie est déjà arrivée, le reste va se poursuivre dans les prochains jours et les distributions ont déjà commencé », a-t-elle estimé. Le croissant-rouge sahraoui (CRS) vient de réceptionner en effet une aide d'ECHO de 170 t de lentilles (déjà distribuée) et 645 t de farine de l'agence espagnole de coopération. Cette aide, qui fait partie de la ration de janvier, est loin de répondre à la situation qui sévit dans les camps qui ont connu une dégradation alimentaire, suite à la réduction suivie d'une suspension de l'aide humanitaire internationale pilotée par les organismes onusiens et financée par les pays donateurs. Les réfugiés n'ont pas reçu de vivres depuis deux mois, en raison de la rupture totale du stock de sécurité. Un stock créé en 2001 et financé par ECHO pour éviter la rupture de l'acheminement des aides. Le président du croissant-rouge sahraoui (CRS), Yahia Bouhobeini, qui a tiré à maintes fois la sonnette d'alarme, tient comme seuls responsables de cette situation notamment, le retard dans l'acheminement des aides, le PAM et le HCR. Selon M. Bouhobeini « le PAM n'a pas fait d'efforts pour reconstruire ce stock, malgré un stand-by de 3 millions d'euros débloqués par ECHO ». Ce qui a fait qu'un simple retard dans l'acheminement des aides se répercute directement sur les bénéficiaires. En d'autres termes, déplore-t-il, « on voulait affamer les réfugiés ». Interrogée à cet effet, Mme Steyer rejette la balle au représentant du PAM à Alger. « Ce problème ne rentre pas dans nos compétences, nous sommes une mission conjointe technique. c'est la responsabilité du représentant de PAM à Alger, c'est lui qui doit gérer cette affaire avec le directeur du PAM basé au Caire (Egypte) », a-t-elle répondu au CRS. Cela étant, en attendant l'exécution du nouveau programme, les réfugiés doivent se suffire des 750 kcal sur les 2100 kcal fixés par les normes du PAM en tant que seuil minimal. « Nous sommes d'accord pour les recommandations de la mission, de continuer la distribution générale, de diversifier les paniers, d'améliorer l'aspect coordination et la coopération mutuelle, mais on s'interroge sur quel nombre de bénéficiaires va se baser le PAM pour l'exécution du futur programme », s'interroge le président du croissant-rouge sahraoui. Ce dernier se dit non convaincu de la réponse qui leur a été fournie par les membres de la mission qui leur aurait signifié que « la question du nombre de bénéficiaires ne va pas rentrer dans les termes de référence de la mission ». Le PAM et le HCR considèrent que les dons de vivres suffisent pour 90 000 bénéficiaires les plus vulnérables. « On s'interroge comment ont-ils pu déterminer ce critère de vulnérabilité », insiste M. Bouhobeini. Pourtant, selon lui, le 17 février 2006, le directeur régional du HCR à Genève, Redouane Nouisser, a reconnu que la décision qui a permis de déterminer les 90 000 bénéficiaires est « une décision arbitraire ». Une source crédible de cette agence lui aurait déclaré que « ce chiffre a été calculé sur la base des images satellitaires ». Bouhobeini s'interroge alors sur le comment de pouvoir arriver à déterminer la vulnérabilité des bénéficiaires à partir d'une image satellitaire. Rabouni (Tindouf) : De notre envoyé spécial