Les attentats à la voiture piégée qui ont ciblé hier plusieurs commissariats et sièges de la Gendarmerie nationale dans les wilayas de Boumerdès et de Tizi Ouzou et fait malheureusement au moins huit morts et une plus d'une vingtaine de blessés, replongent le centre du pays dans un épisode du terrorisme que certains s'évertuent à vouloir faire oublier de la mémoire des Algériens. La synchronisation de ces attentats et leur mode opératoire ne sont pas sans rappeler ceux d'octobre dernier qui ont eu lieu à Dergana, près d'Alger, et à Rouiba. Voitures piégées bourrées et dont l'explosion est actionnée à distance. Ces actions criminelles avaient été à l'époque revendiquées par le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC). Lequel n'a pas d'ailleurs manqué de signer en décembre dernier l'attentat de Bouchaoui contre le bus transportant le personnel d'une société américaine travaillant à Alger. Depuis septembre 2006, le GSPC n'a cessé de faire parler de lui à la suite de son ralliement revendiqué à la nébuleuse islamiste d'Al Qaîda. Les attentats de l'automne et de décembre derniers devaient servir d'acte d'allégeance à l'organisation d'Oussama Ben Laden. Il n'en demeure pas moins que l'on doit s'interroger aujourd'hui sur la portée de la politique de « réconciliation nationale » qui n'a bénéficié somme toute qu'à des égarés du GIA que l'on disait en déroute, sinon défait… La capacité de nuisance terroriste du GSPC étant intacte et sa volonté de destruction tout aussi déterminée, on était en droit de craindre une reprise des attentats, d'autant que sur les plans idéologique et politique l'intégrisme était loin d'être « résiduel », encore moins défait. C'est ainsi que dans le courant de l'année, le ministère des Affaires religieuses reconnaissait qu'une centaine d'imams avait été révoquée pour « dérives graves », en d'autres termes, en raison de leurs prêches incendiaires à l'encontre du pouvoir et soutenant « l'action violente » des « groupes armés ». Quant aux intégristes « recyclés » par la grâce de la réconciliation nationale et « blanchis » de tous les crimes qu'ils ont pu commettre contre la société algérienne, ils n'ont jamais caché leur prétention de prendre le pouvoir par tous les moyens. S'il subsiste aujourd'hui le moindre doute quant aux intentions de ceux-ci, il suffit de revenir aux déclarations tenues par les chefs islamistes des maquis que ce soit en Algérie ou à l'étranger. Les « politiques » du courant intégriste n'ont pas été en reste puisque non seulement aucun d'entre eux n'a eu la moindre compassion pour les victimes des attentats de l'an dernier ni même esquissé le moindre vœu de « retour à la paix » ne serait-ce qu'en exhortant (dans un élan hypocrite) les égarés à déposer les armes, comme l'ont fait le GIA et les autres groupes affiliés. Le pouvoir, de son côté, s'est comporté comme il fallait s'y attendre, comme si toute la décennie sombre du terrorisme devait être mise entre parenthèses, oubliée, effacée. C'est tout juste si la police, qui continue à payer le prix fort dans la lutte antiterroriste aux côtés des autres corps de sécurité, a commémoré le douzième anniversaire de l'attentat du boulevard Amirouche, le 30 janvier dernier. Sans plus. Pis encore, un séminaire international sur la question des disparitions forcées, organisées par plusieurs associations pourtant agréées et qui devait se tenir dans un grand hôtel algérois, a tout simplement été interdit et ses participants dispersés « manu militari ». Pas question pour les autorités de troubler la quiétude de la réconciliation nationale. Il est fort à craindre qu'une telle interdiction ne soit pas la dernière.