Une Opep du gaz n'est finalement pas une si mauvaise idée. Contrairement aux arguments techniques émis par le ministre de l'Energie et des Mines, Chakib Khelil, à propos de l'impossibilité de la création d'une organisation de producteurs de gaz semblable à l'Opep pour le pétrole, le président Bouteflika trouve l'idée plutôt intéressante et à examiner de très près. « Il ne faut pas rejeter l'idée a priori. Elle mérite d'être examinée et discutée entre tous les intéressés », a déclaré le président de la République dans un entretien qu'il accordé au quotidien espagnol El Pais paru hier. Cette organisation, si elle venait à naître, « s'inscrit dans les tendances induites par la mondialisation qui poussent les producteurs à se solidariser pour défendre leurs intérêts », estime le chef de l'Etat. Un accord, conclu en août 2006 entre Sonatrach et le russe Gazprom, avait provoqué, rappelons-le, de vives réactions des clients européens, dont la France et l'Italie, qui craignaient la création d'une « Opep du gaz » qui pourrait peser sur les prix et les approvisionnements. Une crainte qui a été vite dissipée par Chakib Khelil qui, pour rassurer les partenaires de l'Algérie, avait estimé qu'une « Opep du gaz » n'était « pas possible » car « toutes les ventes se font dans le cadre de contrats à long terme ». Aussi, fait-il remarquer, « les prix du gaz sont indexés sur les prix du pétrole, qui répondent déjà à la politique et à la stratégie de l'Opep ». « A quoi servirait alors une Opep du gaz, puisque nous avons déjà une Opep du pétrole qui définit indirectement le prix du gaz ? » s'est-il interrogé. Il ajoutera que le marché du gaz s'appuie sur des gazoducs et des unités de gaz naturel liquéfié (GNL) et « n'a pas la même liquidité que le pétrole ». Mais le ministre n'a pas écarté la possibilité de création d'un marché du gaz liquide d'ici vingt à trente ans. En se déclarant ouvertement favorable à une Opep du gaz, le président Bouteflika rejoint ainsi le président iranien, initiateur de la proposition, et le président russe, Vladimir Poutine, qui avait qualifié, le 1er février, d'« intéressante » l'idée d'une Opep du gaz. Cette dernière sera l'une des questions à débattre lors du forum des pays producteurs et exportateurs de gaz, prévu le 9 avril à Doha (Qatar), auquel prendront part l'Algérie et la Russie. Un forum qui, notons-le, se réunit périodiquement et dont l'objectif est de coordonner les efforts de tous ces pays producteurs et exportateurs de gaz pour assurer la stabilité du marché mondial du gaz, mais surtout la sécurité de son approvisionnement. Dans la contribution qu'il a publiée dans l'édition de cette semaine du supplément El Watan économie, le docteur Mourad Goumiri estime qu'« à la limite, afficher ouvertement la constitution d'un cartel de type Opep pour les producteurs de gaz est moins dangereux et suspect pour l'UE et son allié américain… », et d'ajouter que « toutes politiques, qui ménageraient la chèvre et le chou en faisant appel à un équilibrisme dangereux, nous conduiraient à une perte de crédibilité de la part des deux protagonistes simultanément qui nous rappelleront, le moment venu, notre place relative dans le combat de titans qu'ils se livrent ».