La marche en avant du marché automobile ne se dément pas. 152 000 nouvelles immatriculations en 2006. Un chiffre inespéré après l'interruption en septembre 2005 de l'importation des véhicules de moins de 3 ans d'âge. Circonstance « aggravée » la même année par la défection de la CNEP dans le financement de l'achat de véhicules neufs. Il faut bien admettre que la montée en puissance du réseau de distributeurs, aidée par l'arrivée de nouveaux partenaires financiers, était plus forte que les contingences. L'arrivée fort remarquée au salon de l'automobile d'Alger de nouvelles marques chinoises devrait soutenir la croissance de la vente du neuf. De même la tendance au renouvellement du véhicule après la fin du remboursement de son crédit s'installe chez les ménages. La vente du premier véhicule permet de monter en gamme en combinant un crédit moins cher qu'il y a cinq ans. La consommation ménagère s'étant, entre temps, habituée à vivre sans 25% du salaire. Tout cela est excellent. Mais pour qui ? Pour la sécurité routière ? La preuve est apportée tous les jours qu'elle dépend en priorité non pas de l'âge du parc roulant, mais du civisme des conducteurs. La campagne de retrait de permis a permis en 2005 une baisse de 12% des accidents corporels. Son relâchement en 2006 a fait repartir les courbes de la mort vers le haut. L'arrivée des axes autoroutiers et la modernisation, annoncée et encore retardée, de la signalisation routière sont les prochains rendez-vous d'une amélioration de la sécurité. Excellent pour l'économie nationale ? L'apport du réseau de la distribution au paysage urbain du pays est appréciable. Mais comme pour les opérateurs de téléphonie, les concessionnaires automobiles sont désormais soupçonnés de sanctuariser à leur profit un marché de plus en plus captif. Les limites du boom sur l'emploi et les revenus sont déjà là. Les prix des véhicules neufs repartis à la hausse au tournant de l'arrivée de l'euro en 2002 ne se sont jamais plus ajustés à la série de détente (baisse des taxes douanières, concurrence du yen et du won, etc.) qui aurait pu les faire baisser quelque peu depuis deux ans. En outre, les grands constructeurs distribuent l'Algérie comme un marché tertiaire. La gamme proposée est trop restreinte. Les nouveaux modèles arrivent toujours au-delà de 12 mois après leur lancement. Le réflexe écologique n'est pas envisagé : les véhicules à moteur hybride sont absents — Toyota aurait pu le commercialiser en Algérie. Le pré-équipement GPL ignoré — Fiat ne l'a proposé que sur des modèles en fin de vie. La vérité est que le marché de l'automobile algérien n'est important — le premier en Afrique depuis trois ans — que par la taille de ses achats. Pour le reste, il est à la mesure des ambitions industrielles du gouvernement. C'est-à-dire sous-développé dans tous ses impacts. La preuve ? 17 ans après l'ouverture de la première concession automobile en Algérie avec Daewoo, le pionnier, il n'y a aucune activité d'assemblage, aucune délocalisation significative de la sous-traitance d'équipementier sur le territoire algérien. La conférence sur la stratégie industrielle a bien inscrit le montage automobile parmi les pôles réindustralisant. Comment attirer les investisseurs pour franchir le pas de la distribution à l'assemblage ? Plus facile lorsqu'on tient un robinet de 150 000 entrées de véhicules par an. Le Maroc n'a même pas besoin de cela pour obtenir le montage de la Logan Dacia. L'automobile est une affaire de pilotage politique.