Le Conseil d'association qui regroupe l'Algérie et l'Union européenne (UE) se réunira le 24 avril 2007 au Luxembourg pour la deuxième fois depuis l'entée en vigueur de l'accord d'association en septembre 2005. « Le conseil étudiera l'ensemble des dossiers relatifs à l'application de l'accord d'association. Nous sommes encore dans la phase préliminaire de cette application », a annoncé, hier lors du forum d'El Moudjahid, l'Allemand Wolfgang Plasa, ambassadeur de la Commission européenne à Alger. Interrogé sur l'ordre du jour, le diplomate n'a pas voulu donner de détails. « L'agenda peut changer même au 24 avril au matin », a-t-il dit. Mais il a précisé que le chapitre relatif aux services dans cet accord d'association devait être complété. « Nous vous encourageons à le faire », a-t-il dit, rappelant que l'Algérie n'est pas membre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Situation qui a fait que la négociation de l'accord d'association était difficile. « Lorsque vous établissez une zone de libre-échange avec un membre de l'OMC, vous savez que ce pays, à cause de ses obligations internationales, doit respecter une certaine discipline. Il n'y a pas de raison de le répéter dans l'accord. Et lorsque vous avez affaire à un pays qui n'est pas membre, on doit spécifier les obligations dans cet accord puisque l'UE est soumise à la discipline de l'OMC », a-t-il précisé à une question sur la commercialisation du gaz algérien en Europe. Les contraintes du même type qu'a rencontrées Sonatrach en Espagne par rapport à la vente directe du gaz au client peuvent, selon Wolfgang Plasa, être posées et réglées dans un système multilatéral du commerce. « C'est une condition », a-t-il martelé relevant, au passage, les avantages qui peuvent être tirés. « Lorsqu'on négocie l'adhésion à l'OMC, vous êtes seul face à 140 membres qui ne vont pas changer. C'est à vous de vous adapter à la réalité. Nous sommes là à assister l'Algérie dans ses négociations pour devenir membre de l'OMC. Mais, nous ne pouvons pas assumer des obligations que vous devez assumer. Nous ne pouvons pas faire exception à un pays. Nous ne l'avons jamais fait. C'est pour cela que la Russie n'est toujours pas membre de l'OMC et que l'adhésion de la Chine et du Brésil a duré dans le temps », a-t-il expliqué. Il a relevé que l'Algérie a de grandes chances d'avoir à côté « un marché européen de 500 millions de consommateurs qui ont le pouvoir de payer ». « Et nous avons la chance d'avoir à côté un pays ami qui a d'énormes réserves de gaz naturel. On peut s'aider. Si vous voulez vendre le gaz pour acheter une baguette de pain, le gaz va s'évaporer avant d'arriver au consommateur. Donc, des investissements doivent être réalisés des deux côtés pour faire en sorte que le gaz arrive du Sahara à la cuisine d'un Européen de Cologne ou de Lyon », a-t-il noté, manière de suggérer l'intérêt européen pour des investissements directs dans les champs gaziers algériens. Le rapprochement entre Sonatrach et le géant russe Gazprom, porté par des accords stratégiques signés ces derniers temps, est perçu avec inquiétude à Bruxelles. L'Europe dépend en grande partie de la Russie, de la Norvège et de l'Algérie en matière d'approvisionnement en gaz. « L'Europe n'a pas peur de l'Opep du gaz. Le prix du gaz reste indexé à celui du pétrole. Et puis le marché du gaz est marqué par une certaine rigidité », a expliqué le diplomate dans un langage qui rompt avec celui des experts européens. Par « rigidité », Wolfgang Plasa entendait parler des contrats longue durée qui distinguent le marché gazier. Il a fait un plaidoyer pour une entente entre pays consommateurs et pays producteurs pour que « personne ne tire avantage aux dépens de l'autre ». Les grands pays producteurs de gaz se retrouveront, lundi 9 avril, à Doha à Qatar. Il y est prévu une discussion sur l'idée de création d'une Opep du gaz. Perspective qui inquiète au plus haut point l'Union européenne. L'Iran, le Venezuela et la Russie défendent l'idée de créer une Opep du gaz. L'Algérie y est favorable sans trop se presser. Interrogé sur le dossier de l'immigration et l'image que renvoie le Vieux continent d'une forteresse de plus en plus imprenable, Wolfgang Plasa a eu cette réponse : « L'Europe ne se ferme pas. » Il a reconnu que l'Europe fait face, même si cela est peu apparent, à des problèmes démographiques. « Nous avons besoin d'une politique pour l'immigration. Et qui dit politique, dit sélection », a-t-il précisé. La question de la circulation des personnes sera abordée, selon lui, lors du conseil d'association du 24 avril. Par contre, les thèmes liés aux droits humains et aux libertés politiques ne seront pas discutés. Des parlementaires européens avaient fait pression, ces dernières semaines, pour inscrire au moins le dossier des disparitions forcées à l'ordre du jour du conseil d'association. Leur appel semble n'avoir pas été entendu même si l'article 2 de l'accord d'association en fait obligation à la Commission européenne. « Je constate qu'ici, il y a une attitude relativement critique de l'Europe. Cela me surprend et nous amène à déployer des efforts de communication pour expliquer les choses. Souvent la critique est basée sur une information partielle. On n'est pas considéré comme on devrait l'être », a relevé Wolfgang Plasa qui est en poste à Alger depuis décembre 2006. Son prédécesseur, l'Italien Lucio Guerrato, a-t-il fait du mauvais travail ? « Je ne vise personne dans cela, mais je reproche à nos propres instances de n'avoir pas fait suffisamment d'efforts pour fournir des informations », a-t-il indiqué. Il a défendu les actions menées dans le cadre du processus de Barcelone (lancé en 1995) et a estimé nécessaire de ne plus être « otages » du conflit du Moyen-Orient qui bloque, d'une certaine manière, ce plan visant à créer, à termes, une zone de libre-échange. Il n'a pas omis de souligner que l'UE a apporté 70% de l'aide aux réfugiés palestiniens. Il a dit que les réticences quant à l'adhésion de la Turquie n'étaient pas liées au fait que ce pays soit musulman. « Nous n'avons pas demandé à la Turquie de devenir chrétienne pour faire partie de l'Europe. Nous avons ouvert des négociations pour aboutir à des résultats. La religion n'a rien à voir », a précisé le diplomate. Wolfgang Plasa n'a pas répondu à la question relative aux aspects de défense et de sécurité. Comme il n'a rien dit sur le refus de l'Algérie d'adhérer à l'offre dite de politique européenne de voisinage.