En chœur, le nombreux public présent s'est carrément déchaîné, applaudissant ardemment et avec enthousiasme cette double victoire. Et pour cause, la ville du Vieux Rocher, consacrée capitale africaine et méditerranéenne du jazz, venait de gagner son pari le plus cher, le rêve se réalise enfin, grâce à l'abnégation et au travail précieux mené depuis 5 années par une bande de jeunes férus de jazz, qui, malgré la perte cruelle de deux de leurs plus grand ténors, Aziz Djemmame et Adel Merrouche, se sont quand même distingués en relevant le défi, imprimant au festival une dimension internationale indiscutable. Désormais, Constantine est un carrefour incontournable du jazz, la cuvée de cette année en est l'exemple le plus illustre, car elle consigne la participation d'artistes de renommée mondiale, de jeunes loups qui circulent en marge du showbiz mais qui cependant s'imposent par la qualité de leur musique. Après ce coup d'envoi officiel, le Nefs quartet, mené au rythme hallucinant de la flûte d'un Mohamed Beddiar en excellente forme, qui, savamment soutenu par Ibrahima Gueye, maître percussionniste et Abdeslam Gherbi au gumbri, sans oublier à la guitare le fabuleux marocain Karim Kaïssa, devait graduellement donner le ton et tout le souffle à ce premier spectacle. Les envolées enivrantes du Nefs quartet ont transporté le public qui s'est prêté avec bonheur aux variations musicales bariolées, aux saveurs bien mijotées de l'Afrique et de la Méditerranée. La cuisine de Nefs a suffisamment chauffé le public, le laissant quelque peu sur sa faim et c'est à un autre grand monsieur du jazz-rock qu'a été dévolu l'insigne rôle de gaver un bon coup ce public insatiable. Il s'agit de Mamdouh Bahri, guitariste envoûtant et plein de feeling, qui s'est magnifiquement chargé, avec les Rachid Sbai aux percussions, Francis Balzamo à la basse et René Nan à la batterie, d'enflammer la salle au moyen de mélodies bien entraînantes, swingantes à souhait et aux résonances orientales subtilement mariées. Le public, qui était aux anges pour cette première soirée du Dimajazz, a retenu l'admiration des artistes qui se sont surpassés pour le contenter, comme quoi le bonheur était au rendez-vous et total. Constantine, grâce à la bande à Limma, a accompli avec honneur et mérite un serment des braves, elle expurge un temps ces douleurs pour s'ouvrir généreusement sur l'Afrique, la Méditerranée et le monde et c'est une grandiose victoire, la partition d'une kheloua magistrale.