Après une première nuit bien métissée aux saveurs afro-méditerranéennes, la deuxième soirée du festival Dimajazz a été tout simplement un régal. Oui, l'affiche, concoctée avec goût et doigté, a permis au public constantinois de découvrir de grandes figures du jazz actuel et de se délecter d'un répertoire pour le moins détonant. Steve Houben trio a tout de suite, dès l'entame du spectacle, imprimé une métrique hallucinante à cette nuit qui promettait les altitudes. Le mythique Django d'or de l'année 2000, Steve Houben, l'un des plus illustres saxophoniste et flûtiste belge et européen, dont la critique ne tarit pas d'éloges, continue à rouler sa bosse un peu partout dans le monde, multipliant les expériences musicales, dirigeant diverses formations, montant des projets. Il se retrouve à Constantine pour livrer un aperçu de son art. La flûte, puis le saxo ont résonné plein les tympans pour réciter des partitions de choix, avec la reprise de quelques légendaires et brillants morceaux composés tout au long de sa fabuleuse carrière. Ayant exploité plus d'une facette de la musique jazz, du bop le plus classique à la fusion la plus électrique, n'omettant pas de puiser dans les techniques du swing, Steve Houben, cela fait plus de dix ans déjà, s'ouvre aux musiques du monde. En parfait puriste, outre celles traditionnelles d'Europe, il fouille la musique du Maghreb, la musique brésilienne et cela donne une extraordinaire musique, un jazz raffiné, travaillé au corps, qui vous parle et qui dialogue avec l'autre, prenant la mesure du temps et des parcours pour assurer, comme un bus qui déboule, le transport de tous. La seconde partie du programme de cette deuxième soirée a vu l'excellente formation Tribu, menée par un duo d'enfer, Bo Van De Werf (de bzz puck) au sax baryton et Jeoffroy de Masure au trombone, - tout une peuplade à eux deux -, qui sont avec le tonitruant batteur Chander Sarjoe, les animateurs de la nouvelle scène bruxelloise et européenne du jazz. Les gars de Tribu ont enflammé la salle, d'autant plus qu'à la guitare, s'échinait dans de langoureux défilés et solos le virtuose, le formidable guitariste brésilien Nelson Veras, qui, apprécié à Constantine depuis son premier passage, a été très acclamé. Et c'est au moyen de la fulgurance et de toute la limpidité de leur son, finement élaboré, harmonieux à souhait, que le public a carrément franchi les hauteurs, transcendance en charge de monter, le temps d'une incroyable nuit nouba, une « jazzesthétique » exceptionnelle donnant l'impression de ne vouloir s'achever, sinon avec beaucoup d'acclamations et avec la promesse de se renouveler le plus vite possible.