Sinouj entame le magnifique morceau Impossible, et c'est alors que tout devient possible pour qu'en une communion unique, se réalise enfin le rêve, celui des fondateurs de cette aventure formidable et qui, hélas, ne sont plus là. Kheireddine Dehkal à la guitare, Sassi Larbi au violon, Pablo Hernandez au saxophone et Amar Zahi à la basse ont surpris plus d'un avec leur prestation. Le Sinouj version 2007 n'a plus rien à envier aux autres formations, la qualité du son mais surtout le mariage bien réussi entre la musique traditionnelle, orientale et maghrébine et le jazz en une fusion savamment étoffée et intelligente est bien là. Cette fusion longuement maturée lève comme du bon pain pour lui donner du goût, les grains de Sinouj s'animent pour en faire tout le secret. Cette saveur garde pour richesse le souci de restituer toute la quintessence de la tradition, et noces obligent, se mêle avec amour à la métrique du jazz le plus actuel, mais également le plus cristallin. Shérazed a permis à l'excellent Mohamed Beddiar de Nefs quartet de rejoindre Sinouj et avec les envolées délirantes et mielleuses de sa flûte transporte aux cieux le public. Alger/Constantine, Berab Blues et Maghreb Cosmos sont les titres et le ticket pour un extraordinaire voyage musical. Le Sinouj qui est déjà en studio pour un premier CD, a rendu réalisable le rêve de beaucoup de jeunes constantinois et algériens et plus encore, il reste une leçon et un exemple pour ceux qui veulent réussir des choses, Aziz Djemmame avait bien raison de rêver. La deuxième partie du spectacle a été un moment d'apothéose avec la démonstration de charme et de force d'un Etienne M'bapé complètement déchaîné, le bassiste camerounais, toujours de noir ganté, a donné bien des sueurs au public, les cordes aux couleurs chatoyantes de sa basse ont vibré pour faire se trémousser une jeunesse insatiable qui, à chaque arrêt, en redemandait encore plus. Accompagné par le Su La Take, avec notamment, la sulfureuse, longiligne et gracieuse Catherine Petit au chant et les Hervé Gourdikian, Jim Grandcamp et Roger Biwandu, M'bapé n'est pas passé inaperçu. Constantine se souviendra longtemps de son deuxième et tonitruant passage, sa musique aux confins du traditionnel, de la pop, de la variété et du jazz est un délice qui tantôt vous berce avec douceur, puis subtilement vous invite à claquer fortement du nerf, à frémir de bonheur et à vous laisser transporter par un déferlement infernal de notes scintillantes, aériennes et vaporeuses. Cette troisième nuit du Dimajazz a brillé comme nous le chantent si bien ces étoiles tombées du ciel.