La politique économique du pays fait craindre le pire à Louisa Hanoune. S'exprimant devant les patrons au Forum des chefs d'entreprise (FCE), la porte-parole du Parti des travailleurs, candidate à la présidentielle de 2004, trouve que l'ouverture économique a été « très mal conçue » au point qu'elle constitue aujourd'hui « une véritable menace » pour la souveraineté nationale. Il s'agit plutôt pour elle de « la politique de l'aventure » qui a fait perdre du temps, de l'argent et beaucoup de postes d'emploi à l'Algérie. Son réquisitoire, elle l'a commencé par la signature de l'accord d'association avec l'Union européenne et son entrée en vigueur en septembre 2005. Elle le considère comme « très dangereux » pour l'économie nationale. « L'accord a été très mal négocié, dans une conjoncture marquée par la violence. Le résultat : il est ainsi inégal, injuste et en défaveur de l'Algérie », a-t-elle relevé, demandant ainsi à ce qu'il soit carrément gelé. « Oui. Il faut geler cet accord, si l'on veut protéger notre économie et préserver notre souveraineté nationale », a-t-elle martelé. Est-ce possible de le faire ? Pour Mme Hanoune, rien n'est impossible, d'autant plus qu'il y a une clause dans ce même accord qui permet la révision de certains articles. « Nous l'avons fait pour la loi sur les hydrocarbures, pourquoi ne pas le faire encore pour cet accord duquel l'Algérie n'a jusque-là tiré aucun profit ? », a-t-elle souligné, notant que la seule chose qu'a apportée cet accord d'association, c'est la perte de 24 000 emplois. Sans son gel, Mme Hanoune prédit la « mort définitive » de toute l'activité industrielle en Algérie, qu'elle soit publique ou privée. Elle dit avoir toujours refusé « le fatalisme » selon lequel « on n'a de choix que d'accepter cela », car pour elle « ce n'est pas trop tard », citant au passage les révolutions menées actuellement en Amérique latine, notamment au Venezuela où, selon elle, 3000 entreprises publiques ont été rouvertes depuis la renationalisation des hydrocarbures. Refusant de vivre en autarcie, Mme Hanoune estime cependant que l'Etat doit faire preuve d'un certain patriotisme économique, comme le font des Etats, tels que la France et la Grande-Bretagne, connus pour être des pays capitalistes. Il est primordial, à ses yeux, que l'Etat aide les secteurs productifs public et privé et qu'il mette une stratégie efficiente et les moyens nécessaires pour relever le secteur industriel, comme le font d'autres pays, notamment européens. Elle trouve aussi nécessaire de réhabiliter le ministère de l'Industrie et créer un ministère de l'Economie. Estimant que le secteur privé national doit, lui aussi, être aidé et renforcé, Mme Hanoune dénonce l'exploitation des travailleurs par certains chefs d'entreprise qui ne déclarent pas leurs employés et qui les sous-payent. Ainsi, elle interpelle l'Etat et demande au gouvernement de ratifier les conventions 103 et 138 de l'Organisation internationale du travail (OIT), relatives respectivement à la protection de la femme au travail et à l'interdiction de l'emploi des enfants. Mme Hanoune n'est pas uniquement contre l'accord d'association avec l'UE. Elle demande également la révision de l'accord codifiant les échanges entre l'Algérie et la Chine et d'autres pays asiatiques qui inondent le marché algérien par leurs produits de moindre qualité et qui alimentent, d'après elle, le secteur informel et la contrefaçon. Comme elle se déclare, encore une fois, contre les zones de libre-échange, qu'elles soient arabes, maghrébines ou autres. Mais elle estime qu'il est important de développer le partenariat avec les pays maghrébins et ceux du bassin méditerranéen dans ce qui sera bénéfique pour l'ensemble de ces nations. Interpellée sur sa position par rapport au retour au week-end universel, demande faite également par le FCE, Mme Hanoune dit que cela ne fait pas partie de ses préoccupations. « Pour quoi faire ? Nos exportations hors hydrocarbures sont minimes. Le retour au week-end universel ne profitera qu'aux importateurs. Ce n'est donc pas mon souci », a-t-elle répliqué, précisant que ce qui lui importe est d'abord « d'asseoir la production algérienne, de renégocier pour avoir notre place sur le marché européen ».