La première semaine de la campagne électorale pour les législatives 2007 exprime d'abord une remarquable indifférence de la population, mais aussi un amateurisme grave des prétendants à la députation : comme si les jeux étaient déjà faits, avant même l'expression des urnes. A l'indigence quasi généralisée des discours déclinés dans les créneaux radiotélévisés par les formations politiques s'ajoute à un nouveau type d'abstentionnisme des candidats eux-mêmes : de nombreux espaces d'expression à la radio tirés au sort sous les auspices de la Commission politique nationale de surveillance des législatives (CPNSL) demeurent non utilisés. Et meublés par de la musique classique ; malheureusement pour les mélomanes toujours la même. Cette caricaturale démission devant leur devoir – au moins formel – d'informer sur leurs engagements les citoyens veut dire aussi leur mépris à leur égard. Apparaît ainsi comme un vœu pieux le plaidoyer du coordonnateur de la CPNSL pour que les partis en lice s'impliquent dans le bon déroulement des élections. Les premiers meetings tenus ont drainé essentiellement les militants déjà acquis aux discours des formations respectives. Souvent leur univocité martelée en propagandes ne peut prêter à discussion ; imposant ainsi une démultiplication de prêches unanimistes portés par des slogans en guise d'à valoir aux programmes de campagne. Souvent collés à même les murs les cases réservées par sigles aux compétiteurs les affichettes sont seuls marqueurs physiques de l'espace public qui témoignent de la campagne en cours. Interdites pourtant hors de ces panneaux, nombre de ces affiches balafrent crûment des murs d'immeubles, voire ceux de signalisation routière. Ainsi le RND ne se contente pas d'avoir fait main basse, en plein centre d'Alger, sur une historique bâtisse de style mauresque, transformée en siège orné de son imposant « drapeau », ses colleurs d'affiches ont sauvagement et à grande échelle placardé leurs matériel électoral sur des immeubles tout proches. Ces « militants » savent-ils que l'acte est contraire à la loi ? Le patron de cette formation, Ahmed Ouyahia, ancien ministre de la Justice et ancien chef du Gouvernement, doit lui, quand même le savoir. Cette boulimie dans l'affichage signifie aussi que les gros partis, assis sur des ressources financières aussi énormes qu'incommensurables dans leur opacité de sources, ne lésinent pas sur les moyens mis en œuvre pour, jusqu'à l'outrage, frapper l'attention des citoyens. Des chiffres avancés dans le cas de Constantine (Le Quotidien d'Oran, 26 avril) donnent une mesure des dimensions de la force de vente du parti : 10 000 affiches de candidats ; 50 000 prospectus ; 150 000 autocollants et 30 000 tee-shirts. Au budget de cette campagne à la hussarde, il faut ajouter aussi le chiffrage des rémunérations attribuées aux colleurs d'affiches et colporteurs d'autres gadgets. La surenchère mise en pratique dans la concurrence à occuper les murs par des icônes non porteuses ni d'information ni a fortiori de réflexion est accompagnée par des déclarations faites de langue de bois. En même temps que « le FLN redressé » se targue d'avoir « 75% de ses candidats de formation universitaire », la platitude de son discours n'a pas changé d'un iota. Cette affligeante distorsion renseigne décisivement sur sa suffisance à ne pas supporter de discussion ouverte et contradictoire.« Changement tranquille », « Souveraineté nationale », « Main dans la main pour l'édification d'une Algérie glorieuse. » : la première semaine de campagne électorale a été prolixe d'une litanie de slogans, comme à l'accoutumée. Plus grave tout de même est la démission encore plus accentuée marquant l'opinion publique ; y compris les rares lieux d'expression de l'introuvable « société civile ». Si le coordonnateur de la CNISEL veut vraiment « alerter » - comme il l'a fait par litote, cette semaine via l'ENTV - sur les signes annonciateurs de dérives dans la campagne (« les agents de l'Administration doivent changer de mentalité et rester neutres »), il est aussi théoriquement de sa responsabilité d'y remédier, pour être à la hauteur de sa mission. Plus grave il se défausserait de cette responsabilité s'il ne remédie pas fermement à l'une des grosses entorses observées : l'infraction à la règle « de non - utilisation des portraits du président de la République à des fins électoralistes. »