L'absence de dialogue génère incontestablement la violence. Il semble que la ville ne dispose pas d'interlocuteur fiable, susceptible de se faire entendre. Les interventions timides des quelques sages n'ont pas trouvé d'échos. Hier, la ville a vécu son troisième jour d'émeutes et les affrontements avec les services de sécurité se sont poursuivis, les renforts dépêchés ne sont pas arrivés à mettre un terme aux actes de violence. Tous les accès intra-muros sont restés bloqués, des vagues déchaînées de jeunes et de moins jeunes se sont attaquées à certains édifices. L'ex-institut islamique a été incendié et complètement saccagé, le parc communal, lui aussi, a subi des dégâts. Même constat au foyer des œuvres sociales qui a vu son mobilier détruit. Par mesure de sécurité, les établissements scolaires ont fermé leurs portes. A l'heure où nous mettons sous presse, des colonnes de fumée se dégagent des quatre coins de la ville. Même le bureau de poste de Toumella n'a pas échappé aux actes de vandalisme. Environ une soixantaine de jeunes impliqués dans ces affrontements ont été interpellés et conduits au commissariat, selon une source sûre. Les services de la Protection civile ont dû intervenir plus d'une dizaine de fois pour éteindre des feux. En ce troisième jour d'émeute, la ville offre un paysage désolant, digne d'une cité perpétuellement en guerre. A rappeler que ces émeutes ont éclaté suite au refus des services de police de Bordj Ghedir de laisser les supporters de Ras El Oued accéder au stade pour assister à une rencontre de football, un traitement que les jeunes émeutiers trouvent arbitraire. Le plus décevant est que cet incident dramatique a été récupéré par des forces occultes en pleine campagne électorale. Aux dernières nouvelles, on apprend que les pourparlers engagés par les élus locaux ont essuyé un échec cuisant, puisque les manifestants avaient exigé la libération sans condition de toutes les personnes arrêtées et menacé, le cas échéant, de maintenir le mouvement de protestation. Un avertissement à prendre au sérieux compte tenu des conséquences qui en découleraient. A 17h, un élément de la brigade antiémeute est sérieusement touché à la tête par un fragment de bitume, tandis que les proches des jeunes en état d'arrestation continuent d'observer un sit-in devant le siège de la justice.