La campagne électorale en prévision des législatives du 17 mai aura été marquée sur le plan économique par l'initiative du FCE d'organiser un cycle de rencontres en vue de permettre un débat autour des programmes économiques des partis en lice. Les chefs des partis se sont donc relayés pour exposer les grandes lignes inscrites dans leurs projets économiques et leur ambition affichée de donner toutes les chances au pays de dépasser ses handicaps et de progresser vers le développement et la création de richesses. En guise de propositions cependant, il est à noter que les partis de la coalition notamment se sont quelque peu disputés des pans entiers du programme présidentiel affirmant s'y reconnaître et y adhérer quand ils n'ont pas carrément suggéré qu'ils en étaient les inspirateurs par certains côtés. Une telle approche limite drastiquement les critiques ciblant la situation économique actuelle, et rétrécit également le champ des propositions clairvoyantes et des projections économiques dépourvues d'arrières pensées électoralistes. Il est ainsi très difficile de juger la plupart des partis qui lorgnent vers l'hémicycle de l'APN sur des propositions économiques précises et porteuses d'une stratégie à long terme. Car aujourd'hui, il est de bon ton, de se dire en osmose avec le programme présidentiel tracé jusqu'en 2009, ce qui produit une situation peu féconde en termes de projections et de débats économiques contradictoires. Dans les quartiers généraux des partis, et des différents points de campagne électorale improvisés ça et la à travers le territoire national, le volet économique est également le parent pauvre du débat. Il est clair en effet, que l'enjeu électoral n'est pas forcément tributaire de la donne économique -pourtant vitale pour la bonnes marche des affaires du pays- mais plutôt de calculs et d'alliances politiques. Pour les centaines de prétendants qui se pressent au portillon de l'APN, et notamment les militants de base les plus ambitieux, les urnes du 17 mai prochain sont le tremplin social rêvé, et une place au soleil, avenue Zirout Youcef. Un statut qui n'exige pas forcément de faire campagne pour un programme économique viable mais plutôt de sacrifier au rituel de promesses face à des électeurs, qui aspirent à voir leurs préoccupations et difficultés quotidiennes, vécues parfois dans l'isolement le plus total , transmises à l'APN et résolues. Les chefs des partis politiques qui se sont relayés à la tribune du FCE depuis quelques semaines, ont tous sacrifié, campagne électorale oblige, au traditionnel inventaire de leurs propositions économiques. Représenté par Abdelaziz Belkhadem, le FLN, le vent en poupe, le président Bouteflika étant le premier responsable du parti, n'a pas eu à faire beaucoup d'efforts pour se placer en bonne place sur le terrain économique. Il suffit en fait à Abdelaziz Belkhadem de rappeler que son parti soutient le programme mis en oeuvre par le président de la République et de dénombrer les axes de travail ambitieux et les montants alloués aux différents chantiers. Belkhadem qui a dit donc son adhésion à la stratégie économique présidentielle, parsème tout de même son intervention de quelques propositions visant à affirmer la personnalité du parti. Il en est ainsi de la proposition d'une refonte du système de formation pour mettre sur le marché du travail une main d'ouvre qualifiée et qui réponde aux besoins nouveaux notamment dans le domaine de l'agriculture et de l'habitat. Belkhadem note aussi l'absence d'entreprises de grande envergure capables de prendre en main des projets d'équipements structurants et de tenir tête aux multinationales. Des objectifs qui sont à mettre en ouvre souligne Abdelaziz Belkhadem afin d'oeuvrer pour l'amélioration du rendement et de l'efficacité de l'entreprise algérienne, à la réhabilitation de la valeur du travail et à l'amélioration du pouvoir d'achat. M. Belkhadem qui sous la casquette du FLN expose dans le cadre des débats du FCE son programme économique, n'abandonne pas pour autant ses privilèges de chef du gouvernement puisqu'il expose longuement les bilans de l'exécutif et rappelle les objectifs tracés à la lumière du programme présidentiel. Ouyahia et Soltani sur le terrain de Belkhadem Un bilan et des projections ambitieuses parmi lesquelles Belkhadem laisse perler toutefois quelques aveux d'échecs concernant par exemple la privatisation. "Lancée il y a 10 ans, elle n'a pas donné les résultats attendus" constate Belkhadem qui estime tout de même que son gouvernement a réussi à redéfinir les objectifs de l'opération et d'en accélérer le processus permettant ainsi à l'Etat d'engranger 106 milliards de dinars au cours de la période 2005 - 2006. Invité par le FCE, le secrétaire général du Rassemblement National Démocratique (RND), M. Ahmed Ouyahia, avec sa verve habituelle, fait concurrence à Belkhadem sur le terrain du soutien affiché pour le programme économique présidentiel, estimant notamment que le pays "avance en termes de structuration et de volume d'investissement". Ouyahia a estimé toutefois, que les propositions de son parti visent à " faire en sorte que les efforts consentis dans le cadre du programme soient plus rentables. Il propose pour ce faire pas moins de 140 points dont des mesures urgentes telles " une baisse sélective de la TVA en faveur du consommateur et de la production nationale " Pour Ouyahia " l'assainissement de l'économie, par la lutte contre la fraude est nécessaire " par le biais notamment de la modernisation de l'effectif de lutte contre la contrebande, et le délit économique". Le RND par la voix d'Ouyahia préconise, par ailleurs, dans le cadre de la campagne électorale, une refonte des impositions, telles par exemple la baisse de l'Impôt sur le revenu global (IRG) la réduction des charges patronales des entreprises et la mise en place d'un régime dérogatoire de soutien à l'investissements hors hydrocarbures pour les wilayas du Sud et des hauts plateaux. Pour le foncier industriel, M. Ouyahia propose une réduction de 50% des prix des terrains. Ses promesses qui méritent l'attention flairent tout de même le positionnement électoral comme celles développés par un autre prétendant de la coalition gouvernementale qui ne compte pas laisser les champs libres à ses deux coéquipiers au sein du gouvernement. Le MSP de Soltani avance ainsi d'emblée face au FCE vingt propositions "pour dynamiser l'économie " tout en précisant que " le mouvement ne prétend pas présenter une alternative nouvelle à 100%, car il est conscient que ce qui existe est un acquis national qui a besoin d'être promu et renforcé". Il faut comprendre par là que le MSP ne veut aucunement perturber " une alliance qui marche " en remettant en cause un programme auquel il participe. Il se contente donc de faire quelques observations, et de cibler timidement les insuffisances telles "l'instabilité du processus de privatisation en termes de délai et de transparence"ou " la multiplicité des centres de décision", faiblesse à laquelle il propose de remédier par "la création d'une grande structure économique qui prenne en charge les dossiers économiques " Le RCD estime insuffisante la croissance Se démarquant des partis de l'alliance présidentielle, le RCD se montre pour sa part très critique à l'égard de la politique économique du gouvernement estimant insuffisant le taux de croissance de 5,3% réalisé en Algérie en 2006. Prônant " la révision des méthodes de gestion du gouvernement", le RCD se démarque aussi en mettant à plat " 100 propositions pour l'Algérie de demain ", Selon Saïd Sadi, "en moins de dix ans l'Algérie peut se hisser parmi les pays correctement lotis, avec un marché suffisamment important et une dynamique industrielle conséquente ". Un objectif qui passerait par exemple par " un relèvement des salaires qui implique un rendement supérieur de l'appareil de production, un code d'investissement qui octroie des avantages substantiellement aux entreprises à subordonner des taux d'intégration élevés ou à des exportations de produits fortement valorisés et l'instauration d'une grille de rémunération qui gratifie la prise de risque et enfin un système d'encouragement à la formation interne ". Face aux patrons représentés au FCE, le leader du RCD a promis, si son parti est élu à l'APN, de " créer les meilleures conditions pour permettre au capital national d'investir ". Pour l'ANR,en compagnie de l'UDR, "On ne peut pas proclamer l'économie de marché alors que l'Etat continue d'agir seul. " Redha Malek, associé à Amara Benyounès, prônera donc une véritable économie de marché et ciblera les dangers du secteur de l'informel pour l'économie nationale. Amara Benyounes précisera ensuite la vision partagée par les deux formations politiques en prônant "un passage de l'économie pétrolière à une économie de production" Louisa Hanoune égale à elle-même Même si elle affiche son soutien politique à Bouteflika, Mme Louisa Hanoune reste constante dans ses choix économiques et notamment son rejet de la mondialisation. Louisa Hanoune semble renouveler son inspiration anti- libérale en puisant dans les bouleversements qui s'opèrent en Amérique latine. La responsable du Parti des travailleurs qui rejette avec force le recours aux investissements directs étrangers (IDE), prône plutôt la nationalisation des entreprises stratégiques, telles le complexe d'El Hadjar dirigé par Mittal-Steel et se demande pourquoi on ne pourrait pas affirmer une option nationaliste comme au Venezuela en adoptant une démarche qui aurait selon Louisa Hanoune le mérite d'amorcer un retour "fort de l'Etat" aux affaires économiques.