C'est une Jane Fonda rayonnante qui a remis la palme d'or au réalisateur roumain Cristian Müngïu pour son film 4 mois, 35 semaines et 2 jours. Cannes. De notre envoyé spécial Contre toute attente, car ce n'est pas du tout un film flamboyant. On peut le comparer au travail des frères Dardenne (à Rosette en particulier). Mais c'est en Roumanie pas en Belgique que Müngïu travaille et arrive, comme ses frères, à faire des films avec des bouts de ficelle. Cette palme d'or est un sacré encouragement aux pays où le cinéma est très pauvre et chaque film un travail de longue haleine. C'est pourtant un cinéma qui a dépassé à Cannes les grosses machines américaines, la puissante industrie d'Hollywood, les banquiers et les lobbys présents sur la Croisette pour faire la promotion de leurs productions tapageuses. Le jury, cette année, a tenu à récompenser un cinéma quasiment sans espoir, un cinéma austère, sans moyens, sans stars. C'est un sujet sur l'avortement qui apparaît au départ conventionné, commun et dépassé. Mais cela se passe dans la Roumanie de Ceaucescu et cela seul fait son grand intérêt. Il y a tout ce qu'un régime de dictature impose au peuple : contraintes familiales, bureaucratiques, policières. Toute l'histoire d'une jeune fille qui veut avorter est marquée par les pesanteurs du régime, le conformisme, l'archaïsme de la vie quotidienne. Par opposition, nous voyons la force, l'ingéniosité d'une jeune fille et de son amie qui, seules, arrivent à briser les obstacles et à trouver la solution. De tous les points de vue, cette palme d'or 2007 est une grande leçon de courage. Contre vents et marées, le cinéma roumain existe et triomphe à Cannes. Cela doit être encourageant pour le cinéma algérien aussi qui cherche à sortir de la déprime.