Les hommes politiques ne rêvent pas uniquement de pouvoir, ils rêvent aussi très probablement de croissance et de plein emploi. Leur première préoccupation à n'en point douter est d'arriver à rendre ce rêve possible. Ils sont convaincus qu'il y aurait tant de choses à faire pour leur pays. Pour y parvenir, ils ne ménageront aucun effort pour procurer à tous les citoyens un job et un logement pour commencer, en attendant le reste. Et c'est précisément le vœu de tous les citoyens qui ne rêvent plus. Ces deux forces pourront-elles se rencontrer pour se réconcilier ? Un vent de synergie soufflera alors et le travail retrouvera sa valeur. C'est un immense chantier à la mesure de nos potentialités qui attend nos gouvernants parce que la croissance et l'emploi ne se décrètent pas et ne se satisfont pas d'envolées lyriques. Ils sont la résultante d'actions et de politiques intelligentes et savamment orchestrées. La tâche sera ardue parce qu'il s'agira d'introduire des changements pour secouer le cocotier de la rente. On connaît la force d'inertie qui sera développée par les tenants du désordre actuel. Par où commencer ? Le rêve étant l'étape finale d'un processus déclenché par le sommeil. Autant dire que le réveil, c'est-à-dire la réalité, ne sera pas aussi coloré que fut le rêve. Et pourtant, c'est cette réalité peuplée d'entreprises à privatiser, de banques sans banquiers, de sans domicile à loger, de chômeurs à recruter, de harragas à la recherche d'un statut, d'investissements directs étrangers à orienter, de projets en quête de financement à faire financer, d'idées en attente de chercheurs à exploiter, de marchés à discipliner, de cloisonnements à décloisonner, d'une nouvelle stratégie industrielle à négocier, de foncier détourné, de routes déformées, d'informel à convertir en formel, de lois promulguées durant les précédentes législatures à faire appliquer et de nouvelles lois à voter… qu'il faut transformer pour que le rêve se réalise. Le passif n'est pas aussi lourd que cette énumération limitée à quelques éléments parmi tant d'autres pourrait le suggérer pour peu que le politique accepte de jouer sur le terrain constitutionnel. Le rêve pourrait se prolonger et devenir encore meilleur si le centre d'intérêt se déplace pour se positionner sur les chemins non escarpés de l'innovation et du progrès débureaucratisé. Après les législatives, l'Algérie aura de nouveaux gouvernants. Ils bénéficieront d'un environnement économique très avantageux. Il ne tient qu'à eux d'en faire profiter les Algériens ou de gâcher cette aubaine. S'ils sont capables de relancer les réformes qui permettent à notre économie de rester sur le chemin de la croissance, tant mieux. L'argent n'est plus une contrainte, le pays dégage des excédents qui ne demandent qu'a être utilement et socialement dépensés. S'ils hésitent et remettent à plus tard tout ce qui doit être fait, tant pis. Ils n'auront pas l'excuse de l'instabilité enterrée ni celle d'ailleurs d'une mauvaise conjoncture, puisqu'elle est localement et mondialement excellente. Nos nouveaux gouvernants ont réellement de la chance. Il faut faire en sorte que nous devons profiter comme nos voisins de cet environnement international favorable, car nous avons tergiversé jusqu'à présent pour engager les entreprises et l'administration économique sur le chemin de la compétitivité. Nos avantages ne sont pas valorisés à l'extérieur. Ceux qui s'implantent chez nous ne pensent qu'à nous vendre. Les réformes à réaliser en urgence sont celles du foncier, de l'assainissement de l'environnement économique et financier, de la débureaucratisation, du marché du travail et de la protection sociale, elles tournent toutes autour de la maîtrise des dépenses publiques, de la privatisation, de la régulation, du désengagement de l'Etat, de la flexibilité, de la mobilité et de la concurrence. Ajoutons de la transparence pour habiller tout cela et nous aurons relevé le défi de notre rêve. Nous sommes mal classés partout, pour avoir différé jusque-là les réformes. Nous sommes vraiment au pied du mur. Le choix est clair pour nos gouvernants en ce début du troisième millénaire. Le rêve de deuxième génération pourrait alors se décliner.