L'immense complexe touristique, qui se trouve à la sortie ouest de la localité côtière de Tipaza, Matarès à 70 km d'Alger, avait été inauguré le 3 juillet 1971 par le défunt Président Houari Boumediene, vit malheureusement aujourd'hui de son passé, mais sa notoriété ne cesse de se dégrader, de surcroît de se salir, d'une manière effarante de jour en jour. Tipaza. De notre bureau L es gestionnaires de l'Entreprise de gestion touristique de Tipaza (EGTT), soucieux de la remise à niveau de cet espace naturel d'évasion d'autrefois, hélas défiguré par l'agression du béton, et en dépit de leur bonne volonté, sont prisonniers de l'humeur des décideurs du holding, la SGP de l'Etat « Gestour ». Beaucoup de millions de dinars ont été dépensés pour la filialisation des unités de l'EGTT. Une démarche initiée par le holding et exécutée sur les fonds propres de l'EGTT. Ces deniers publics ont été gaspillés en fin de compte grâce à l'autorisation des « gens d'Alger ». Il est intéressant pour les pouvoirs publics, les hautes autorités du pays, de se pencher « sur ce feuilleton » de filialisation de l'EGTT qui n'a jamais abouti, jamais vu le jour et dont personne de « ces gens d'Alger » ne veut en parler. Le complexe touristique Matarès qui compte deux hôtels est livré, malheureusement, aux dégradations multiples et à la pollution. Les estivants sont à l'origine de cette pollution, mais le désintéressement des « fonctionnaires » de ce complexe touristique figure parmi les causes de sa décomposition. L'accès à ce complexe en voiture coûte 200 DA. Le piéton doit payer 20 DA pour y pénétrer alors que la clôture de cette infrastructure touristique est une véritable passoire. Le tarif d'accès d'un bus ou d'un minibus a été fixé respectivement à 600 et 400 DA. Marché balnéaire En ces journées du début du mois d'août, selon l'un des nombreux gardiens postés à l'entrée, plus de 1000 véhicules rentrent chaque jour à Matarès. Ce qui surprend le visiteur curieux, c'est incontestablement l'existence du nombre impressionnant des activités commerciales (ndlr, kiosques) qui ne répondent pas aux normes exigées par le tourisme. Une formule de location des commerces qui fait rentrer quand même de l'argent dans les caisses de ce complexe touristique à la dérive. Un décor agressif, mais pas du tout du niveau du Smig pour le tourisme de masse. C'est normal, du moment que l'Algérien, aujourd'hui, se permet de louer une habitation précaire au bord de la mer, juste pour passer ses vacances, en se fichant des conditions d'hygiène de son séjour. Matarès, reflète cette image d'une ville banale, surpeuplée, qui n'offre pas réellement des moments de repos pour ces familles qui ont opté cet été pour ce complexe touristique. Au niveau de la réception, un jeune sympathique avec son accent kabyle, issu de l'école nationale du Tourisme et de l'hôtellerie de Tizi-Ouzou nous accueille pour nous indiquer les tarifs des chambres de l'hôtel de la Baie. Celui d'un séjour sans pension varie entre 2727 DA jusqu'à 6220 DA par jour, tandis que celui en demi-pension est légèrement plus supérieur, allant de 3535 DA à 8480 DA. Nous quittons le hall de réception et nous nous dirigeons vers la terrasse éclairsemée de parasols d'autres opérateurs. Il faut inévitablement passer par le salon-bar. Des boissons alcoolisées, des boissons chaudes et fraîches sont servies. Des hommes avec leurs yeux doux en quête « d'affection » sont attablés au salon, échangeant des regards avec des jeunes femmes. Certaines d'entre elles, en tenues sexy, cigarettes à la bouche, font semblant de contempler la plage, dans l'attente d'une « proie pleine aux as ». Matarès est connu pour être un sanctuaire des femmes de joie. Le nombre de ces femmes qui font oublier les problèmes « aux mâles » avoisine les 80, selon les confidences d'un employé. Elles travaillent en toute sécurité à l'hôtel de Matarès et font fonctionner les activités. Cette faune humaine a investi Matarès depuis des années. « Sincèrement, durant les saisons creuses, c'est grâce à elles que nous percevons nos salaires », dit-il. Il s'agit de cas sociaux. Chacune d'elles a son histoire, nous déclare cet employé de l'EGTT. La grande plage de Matarès est « couverte de parasols et de roseaux ». Il fait chaud. La promotion commerciale bat son plein sur une partie de cette plage sale du Chenoua qui fait partie de Matarès. Deux tentes appartenant à deux opérateurs de boissons rafraîchissantes, sont assaillies par des jeunes excités et bronzés. Les gobelets en plastique sont jetés sur le sable. On suscite les réflexes sauvages de consommations de ces boissons dans la bousculade, sous un soleil de plomb, mais on n'apprend pas à ces consommateurs à préserver leur environnement. Drôle de promotion commerciale ! Les animateurs d'un opérateur de téléphonie mobile, dans cette ambiance anarchique, tentent de détendre l'atmosphère par des rythmes musicaux. Hygiène : pas de sanitaires Des agents de sécurité du complexe interdisent aux baigneurs en tenue de plage de pénétrer dans le hall de l'hôtel. Une jeune fille demande alors l'autorisation d'aller aux toilettes, avant de retourner vers la plage. « Il n'y a pas de toilettes ici », lui répond le gardien. « Habille-toi et regagne ta chambre pour aller aux toilettes », ajoute-t-il. Les produits alimentaires exposés dans les nombreux « commerces » nous font reculer. Des détritus sont jetés partout. Les poubelles vertes sont pleines. Des odeurs infectes s'en dégagent. Certains couples « SDF » occupent des coins reculés à l'intérieur du vaste complexe de Matarès. La première piscine désertée est asséchée, laissant apparaître des traces de rouille. L'ex-quartier commercial du complexe touristique Matarès est quasiment vide. Un agent de sécurité qui se trouvait le long de l'allée s'est volatilisé. Notre présence semble gêner ce gros bébé en compagnie de son amie bronzée. Le couple éphémère en tenue de plage, presque nu, s'est dissimulé dans un coin le long de cette allée, à l'abri des regards. Hélas ! Des excréments humains et d'urine dégagent des odeurs nauséabondes le long de cette allée autrefois animée et très fréquentée par les touristes. Point de restaurant. Aucun salon de thé. Les occupants des chambres font sécher leurs linges aux fenêtres. Les éléments de la Gendarmerie nationale se trouvent à l'intérieur de leur petit refuge. Leur présence vise à dissuader les aventuriers. La 2e piscine du complexe ne fonctionne plus depuis des années, en raison de problèmes techniques. Certains espaces verts sont bien entretenus. Le civisme chez les jeunes estivants et passagers qui se trouvent dans ce complexe touristique est inexistant. L'hygiène des lieux laisse à désirer, une situation qui ne suscite aucune réaction chez ces estivants indifférents. Matarès se « bidonvillise », se ruralise. L'absence de l'hygiène est devenue inquiétante, mais elle arrange bien ces « patrons » d'Alger. La gestion de ces complexes touristiques à travers ces ex-holdings illustre incontestablement une erreur des pouvoirs publics. L'Etat doit s'occuper du tourisme et accompagner les opérateurs de ce secteur et non pas se charger directement de la gestion des bars, des restaurants et des chambres d'hôtels. Le ministre de l'Aménagement du territoire et de l'Environnement et du Tourisme (MATET), Chérif Rahmani, devra effectuer une virée anonyme dans ce complexe, de préférence sans alerter personne, pour se rendre compte de l'état de déliquescence dans lequel baigne l'un des joyaux de l'Etat, conçu par l'architecte français Pouillon. Cette infrastructure mérite un autre sort que celui dont lequel elle se trouve. En quittant ce complexe touristique, qui affiche quand même des statistiques satisfaisantes en ce mois d'août 2007, un responsable nous fait savoir que la direction du complexe Matarès vient d'être félicitée par un opérateur qui se charge des voyages Omra. Néanmoins, nous nous sommes interrogés : pourquoi y-a-t-il autant de monde à Matarès, alors que beaucoup de familles critiquent sévèrement l'état dans lequel il se trouve ? Même le président Bouteflika, à partir de Annaba, a balancé ses remontrances ! Rien n'a changé hélas, les patrons de la SGP de l'Etat Gestour entretiennent les lieux et perpétuent l'ambiance à Matarès. Chérif Rahmani aura-t-il suffisamment de forces pour changer le cap de Matarès ?