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Bye, bye, Bangkok !
Voyage-Dans le sillage du cinéma
Publié dans El Watan le 20 - 09 - 2007

Ce pays, où l'on produit plus de 100 films par an, est à lui seul un spectacle. Aux abords du festival international, instantanés et impressions de notre reporter.
Me voici de nouveau sur le pavé luisant de Bangkok. Cette cité n'a rien perdu de son mystère et de sa fascination. Des grappes d'autos s'enchevêtrent sur le Rama Road devant l'hôtel. Je quitte le Dusit Thani, marbre et verre, piscine et jacuzzi, en short et chemise, la chaleur me happe pourtant comme une ventouse. C'est le temps de la mousson et des orages qui tombent sans délai tous les soirs sur la ville. Je traverse ce quartier huppé où les tours des banques et des multinationales se mirent dans l'eau de cristal du lac de Lumphini Park. Je fuis le brasier de la rue et grimpe à la station Sarawang du Sky Train. Direction : le Festival du film de Bangkok. C'est jour de fête, le métro aérien est plein à craquer. Comme un ballon dirigeable, le Sky Train se faufile entre les gratte-ciel, au-dessus des maisons de teck, des marchés flottants, des rives du Chao Phraya, la rivière qui sillonne à travers Bangkok. La glissade me conduit au Central Plaza, fief du festival où je vois des containers décharger devant les salles leurs cargaisons de fictions, films de cape et d'épée, karaté, arts martiaux... Au septième étage de Central Plaza, c'est un caravansérail d'images en provenance d'Asie et du monde entier. Les halls sont décorés d'affiches. Il y a aussi dans le programme des drames romantiques, des thrillers, des classiques sortis pour l'occasion de l'ombre des musées de cinéma. Pendant douze jours, le temps que dure le Festival de Bangkok, Central Plaza va débiter des milliers d'images, et d'abord à l'emblème de quelques cinéastes de Thaïlande et d'Asie du Sud-Est. Le problème linguistique est parfois aigu. Difficile de suivre les histoires quand il n'y a pas de sous-titres anglais ou autres. Pour le reste, le terrain est familier pour qui aime la beauté indéfinissable des fictions où les acteurs volent dans les airs dans un ballet impeccable... Le grand mérite de l'organisation du Festival de Bangkok revient à la Tourism Authority of Thailand (TAT) dont le gouverneur, Madame Phomsiri Manohan, et son adjoint, Kunjara Na Ayuthaya, tous deux cinéphiles réputés à Bangkok, font assaut de courtoisie pour accueillir les invités. Dont le petit groupe de journalistes parlant diverses langues qui parcourent la planète pour voir des films et qui n'ont pas le mal du pays... On vient d'Alger, de New Delhi, de Los Angeles pour se lancer à l'assaut des films du Festival de Bangkok, mais aussi pour les brochettes succulentes vendues dans les stands de la rue et pour la chaire fondante des papayes et des mangues que l'on déguste au marché nocturne. La roue du cinéma tourne à Bangkok. On produit ici 100 films par an. Les distributeurs d'Asie venus de Kuala Lumpur, de Jakarta, de Manille découvrent la nouvelle vague thaïlandaise. Ils repartent avec des films dans leurs bagages. Ils signent joyeusement leurs chèques et vont en délégation faire la fête dans le Bangkok by night. Eux, non plus, n'ont pas le mal du pays. Ils sont à Bangkok et se croient déjà de retour : la mousson est le déluge le mieux partagé dans cette région du monde. Les moines bouddhistes, que je voyais très souvent lors de précédents voyages à Bangkok, ne manifestent aucun empressement, cette fois, à sortir en bande dans les rues. C'est la période de carême. Les moines ont tous rejoint leurs monastères. Il paraît que les astres sont favorables. A Bangkok, où on a la fibre financière, le business du cinéma se porte bien. A Central Plaza, les caisses de bobines d'images vont bientôt naviguer vers d'autres ports aux confins de l'Asie. A la gare de Bangkok, je voyais chaque jour partir les trains vers Pénang, Kuala Lumpur, Singapour... Un vieux classique du cinéma réalisé par David Lean (au programme du Festival de Bangkok) me rapportait la légende du film Le Pont de la rivière Kwai (voir article ci-après) et sa fameuse chanson Hello ! Le soleil brille, brille… Hello... Le train pour Kanchaburi à la frontière de la Birmanie partait tôt le matin vers les collines boisées et les champs de canne à sucre. Là où le pont de la guerre, quand tonnait le canon entre les Japonais et les Anglais, enjambe la rivière Kwai. Il y a eu beaucoup de morts dans cette guerre-là. Il reste aujourd'hui un cimetière de boutiques pour touristes. David Lean avait tourné son film, en 1957, avec Alec Guiness, William Holden et Sessue Hayakawa plongés dans la fournaise et rôtis au soleil pendant les mois de tournage. Les centaines de figurants anglais grognaient à cause de la présence de serpents dans la jungle. Un jour, David Lean a plongé dans la rivière, le courant l'a emporté. Il fut sauvé in extremis. Tant mieux pour son chef-d'œuvre. Le pont que l'on voit, aujourd'hui, avec des trains qui passent dessus, n'est pas l'original qui fut bombardé par les Anglais. Retour à Bangkok. Devant les salles de cinéma de Central Plaza, les spectateurs s'agglutinent avec un air mélancolique. Certains campent des heures ici en mangeant des bols de popcorn. Ils ont échappé à la fournaise dehors. Ils attendent le lever de rideau sur des œuvres venues du monde entier. Il est temps de rejoindre le Dusit Thani, le palace qui abrite les journalistes invités au festival. J'entre dans un restaurant proche de l'hôtel et me demande aussitôt comment je vais arriver à manger mon plat de riz thaï avec des baguettes ...

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