Tout bon cinéphile doit avoir vu Le pont de la rivière Kwaï, un véritable film-culte. Sorti en 1957, il a obtenu 6 oscars : meilleur film, meilleur metteur en scène (David Lean), meilleur acteur (Alec Guinness), meilleur directeur de la photographie (Jack Hildyard), meilleur compositeur (Malcom Arnold) et meilleur scénario ! Coproduction américano-britannique, le film est adapté du roman éponyme français de Pierre Boule (1952). Il a été classé 13e plus grand film de l'histoire du cinéma américain et a enregistré 33 millions d'entrées aux USA et 13 millions en France, des chiffres énormes pour son époque. Le talent du réalisateur est pour beaucoup dans ce succès. David Lean, en effet, est celui qui réalisa entre autres des films aussi exceptionnels que Vacances à Venise (1954) ou Le docteur Jivago (1966). L'action du film se situe en Thaïlande, durant la Seconde Guerre mondiale. Dans un camp japonais, des prisonniers de guerre britanniques sont forcés de construire un pont d'une importance stratégique pour renforcer l'occupation de l'Asie du Sud-Est par le Japon. Le projet donne lieu à un affrontement entre les deux groupes, geôliers et prisonniers, à travers leurs chefs, le colonel Saïto et le colonel Nicholson, brillamment interprétés par Sessue Hayawaka et Alec Guinness. On a reproché au film de n'avoir pas montré toute l'atrocité des conditions de détention dans les camps japonais mais il démontre de manière magistrale l'absurdité de la guerre et ses effets sur les valeurs et les attitudes humaines. Il révèle aussi, au-delà du conflit, la force des préjugés européocentristes, incarnés notamment par le colonel Nicholson : « Nous pouvons donner à ces sauvages une leçon sur l'efficacité des méthodes occidentales qui leur fera honte. » Le fameux pont a existé dans la réalité, moins grand que celui du film mais sans doute, aussi important puisqu'il fut bombardé par les Alliés avant d'être remplacé aujourd'hui, par un pont métallique de chemin de fer (voir ci-contre reportage). Pour le tournage, un vrai pont fut construit et a réellement explosé avec un véritable train au dessus. Le thème musical du film, sifflé par les prisonniers, et connu sous le titre de Hello, le soleil brille… a connu un succès mondial et marqué une génération par son optimisme ironique. On notera également que deux des scénaristes (Carl Foreman et Michael Wilson), victimes de la chasse aux sorcières de la Commission McCarthy, ne reçurent pas l'oscar qui revint au Français Pierre Boulle. Ce n'est qu'en 1984 que cette injustice fut réparée. Enfin, il faut noter que son tournage a eu lieu au Sri Lanka et en Angleterre et non en Thaïlande comme on l'affirme souvent. Le pouvoir de la fiction sur la réalité…