Suspecté d'être le financier des attentats de Paris en 1995 revendiqués par le GIA, Rachid Ramda comparaît depuis hier en tant que complice devant la cour d'assises de Paris présidée par Didier Wacogne, assisté de six magistrats professionnels. Paris. De notre bureau Le procès devrait durer un mois. L'accusé répondra-t-il enfin aux questions que se posent les victimes depuis douze ans ? A la fin d'une première journée consacrée à la lecture des faits et aux arrêts d'accusation, la défense de l'accusé, représentée par maîtres Bono et Serre, a plaidé la nullité de la procédure et donc la mise en liberté de Rachid Ramda, avançant que ce dernier a été jugé le 29 mars 2006 par la 16e chambre du tribunal correctionnel de Paris pour les mêmes faits, jugement confirmé par la cour d'appel de Paris le 18 décembre 2006, et qu'au vu de la législation française et des conventions internationales ratifiées par la France, un suspect ne peut pas être jugé deux fois pour les mêmes faits. Cette demande ne devrait pas être retenue par la cour. Maître Holleaux, avocat d'une partie des victimes ou de leurs ayants droit, a eu ce bref commentaire à la sortie de l'audience : « L'argumentaire de la défense ne tient pas la route. On essaie de faire le procès du procès, c'est la même technique qui continue. » Pour Françoise Rudetzki, déléguée générale de SOS Attentats, « les victimes attendent que Rachid Ramda reconnaisse ses responsabilités ». Une des parties civiles dira : « Il faut que Rachid Ramda soit jugé et subisse la même peine que les deux autres, Boualem Bensaïd et Smaïn Aït Belkacem. » Au titre de témoins, la défense de Rachid Ramda a fait citer notamment le directeur de la maison d'édition La Découverte, François Gèze, l'ancienne journaliste de Libération, José Garçon, Jean-Baptiste Rivoire, journaliste à l'agence Capa, les ex-militaires Mohamed Samraoui et Abdelkader Thiga, des enquêteurs britanniques et l'ancien ministre de la Justice, Jacques Toubon. Jean-Louis Debré, également cité en qualité d'ancien ministre de l'Intérieur, a, dans un courrier à la cour, indiqué qu'il n'était pas disponible pendant toute la durée du procès. Les parents de Rachid Ramda et un de ses frères devront également témoigner devant le tribunal. « Ramda va vouloir dévier le débat, les victimes attendent qu'il soit condamné pour sa participation aux trois attentats (stations Saint-Michel, Maison Blanche et Orsay) », nous indiquait un peu plus tôt maître Holleaux. Rachid Ramda est poursuivi pour « complicité d'assassinats en relation avec une entreprise terroriste » concernant les attaques des stations du RER Saint-Michel (8 morts, 150 blessés, le 25 juillet 1995), du métro Maison Blanche (18 blessés, le 6 octobre 1995) et du RER Musée-d'Orsay (26 blessés, le 17 octobre 1995). Les écoutes menées par la police ont révélé que Rachid Ramda était en rapport téléphonique régulier avec Ali Touchent (tué en mai 1997 à Alger) et Boualem Bensaïd, coordinateurs des attentats du GIA en France. Par ailleurs, l'accusation s'appuie sur de nombreux documents saisis chez lui, dont des ordres écrits du GIA et le texte d'un ultimatum envoyé le 27 août 1995 au président Chirac par le GIA lui demandant de se convertir à l'Islam. L'empreinte digitale de Ramda figure sur un bordereau de virement Western Union de 5000 livres sterling (38 000 FF de l'époque), envoyé à Boualem Bensaïd. Ce dernier a été condamné à perpétuité à Paris ainsi que Smaïn Aït Belkacem, en 2002. Ils devraient venir témoigner le 10 octobre, a annoncé le président de la cour, Didier Wacogne. Dans un entretien publié hier par Libération, Rachid Ramda nie les accusations dont il est l'objet. Interpellé le 4 novembre 1995 en Grande-Bretagne où il résidait, en vertu de mandats d'arrêts français, Rachid Ramda avait été extradé vers la France le 1er décembre 2005 au terme d'une longue bataille de procédure. La vague d'attentats ou tentatives d'attentats en France avait débuté le 11 juillet 1995 par l'assassinat à Paris de l'imam Abdelbaki Sahraoui.