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L'opposition aux tests ADN reste vive
Projet de loi sur l'immigration
Publié dans El Watan le 08 - 10 - 2007

L'Algérie, le Maroc et la Tunisie ne sont pas concernés par le recours aux tests ADN auxquels certains candidats au regroupement familial devront se soumettre pour prouver leur filiation.
L'adoption, jeudi, par le Sénat, du projet de loi sur l'immigration revu, cadré et expurgé, n'a pas pour autant éteint les réactions de rejet très vives quant à certaines de ses dispositions dont l'article portant sur les tests ADN auxquels devront se soumettre certains candidats au regroupement familial. Les sénateurs ont adopté tôt jeudi, par 176 voix contre 138, des amendements encadrant davantage le recours aux tests ADN pour les candidats au regroupement familial voulant prouver leur lien de filiation. Cet amendement de substitution encadre plus strictement le recours aux tests ADN en prévoyant une autorisation judiciaire préalable. Il stipule que la comparaison des empreintes génétiques ne pourra se faire qu'entre l'enfant demandeur du visa et sa mère installée en France, et non son père. Les pays visés sont ceux dont l'état civil est défaillant. L'Algérie, le Maroc et la Tunisie ne sont pas concernés. Le projet de loi doit être de nouveau examiné par l'Assemblée nationale, en vue de son adoption définitive. Les sénateurs ont, par ailleurs, entériné la création d'un contrat d'accueil et d'intégration pour les parents d'enfants bénéficiant du regroupement familial avec une formation « sur les droits et devoirs des parents en France ». Son non-respect pourra être sanctionné par une suspension des allocations familiales et un non-renouvellement de la carte de séjour. Les sénateurs devaient encore débattre de points très sensibles : droit d'asile, statistiques ethniques. En commission, ils ont rétabli à un mois, au lieu de quinze jours, le délai de recours devant la Commission des réfugiés et allongé de 24 à 48 heures le délai pour déposer un recours contre un refus d'entrée sur le territoire. Le dernier article introduit par les députés pour exclure les sans-papiers du dispositif d'hébergement d'urgence a été supprimé par les sénateurs en commission. Un large front d'opposition à la possibilité de recourir à des tests ADN comme preuve de filiation s'est dessiné une pétition lancée par Charlie Hebdo et SOS-Racisme. « Nous sommes… face à un amendement qui, sur les plans éthique, scientifique et du vivre ensemble, introduit des changements profondément négatifs. C'est pourquoi, nous, signataires de cette pétition, appelons le président de la République et le gouvernement à retirer cette disposition, sous peine de contribuer, en introduisant l'idée que l'on pourrait apporter une réponse biologique à une question politique, à briser durablement les conditions d'un débat démocratique, serein et constructif sur les questions liées à l'immigration. » Parmi les milliers de signataires de cette pétition, d'anciens premiers ministres de droite et de gauche, des responsables de partis politiques, de syndicats, d'associations, des comédiens, chanteurs, réalisateurs de renom, scientifiques, intellectuels, sportifs… de renom… « La génétique ne fonde pas un lien familial », selon René Frydman, gynécologue-obstétricien : « Cette mesure est profondément attentatoire à nos principes républicains, contraire à la mission universaliste de notre pays. Et elle n'est ni utile ni efficace », affirme Dominique de Villepin, ex-Premier ministre. Le Parti socialiste a dénoncé la « dérive front-nationalisante » d'une partie de la droite dans le débat sur le projet de loi sur l'immigration. La Conférence des évêques de France a dénoncé « les mesures toujours plus restrictives » en matière d'immigration, qui risquent d'apparaître « comme des concessions à une opinion dominée par la peur plutôt que par les chances de la mondialisation ». Les évêques se sont aussi inquiétés « des conditions toujours plus restrictives mises au regroupement familial qui est un droit à respecter ». Même réaction du côté des associations protestantes qui ont pointé du doigt « les risques de fragilisation accrue des familles étrangères et des demandeurs d'asile ». Concernant les tests génétiques, elles fustigent une « intrusion dans la vie privée et l'intimité des familles », prohibée « à l'égard des familles françaises ». Le président de la Commission de l'Union africaine (UA), Alpha Oumar Konaré, a jugé ce texte « inconcevable » et « inacceptable au niveau éthique, moral et culturel pour l'Afrique. Le président sénégalais, Abdoulaye Wade, premier chef d'Etat étranger à avoir pris officiellement position sur le sujet, s'était déclaré fermement opposé à cette mesure. Le Comité consultatif national d'éthique estime dans un avis publié jeudi que l'inscription dans la loi d'une identification biologique réservée aux seuls étrangers fait de la filiation génétique un facteur déterminant « en contradiction avec l'esprit de la loi » française. Il redoute également que le recours à de tels dispositifs ne conduise à une « banalisation » de l'identification génétique avec les risques afférents de « discrimination » et déplore la « présomption de fraude » qu'implique le recours aux tests. « Il s'agit en réalité de donner un droit nouveau aux étrangers de bonne foi dans un cadre offrant toutes les garanties de respect des principes de notre droit », a assuré le Premier ministre, François Fillon. « Il n'y a pas d'immigration sans contrôle ni sans exigence. C'est la raison pour laquelle nous voulons passer d'une immigration subie à une immigration choisie et nous entendons nous doter de tous les moyens permettant d'aboutir à ce résultat », a plaidé François Fillon.

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