Cette année, le marché national du concentré de tomate connaîtra un déficit certain. Une production de moins de 20 000 tonnes aurait été réalisée au moment où les besoins de consommation sont estimés à plus de 70 000 tonnes. Pour combler ce déficit, le recours aux marchés extérieurs est encore une fois incontournable. Parmi les marchés le plus souvent sollicités, incontestablement celui de notre voisin de l'Est. Avec une production de plus de 160 000 tonnes /an et une consommation d'à peine 20 000 tonnes, la Tunisie est un grand exportateur de tomate. Avec la rude concurrence que connaît le marché international, les producteurs tunisiens sont partis à la conquête d'autres marchés. Le plus porteur, proche et le moins coûteux, reste le marché algérien. Finalement, la ruine du secteur, calculée à partir de 2002, a mis à nu les véritables desseins qui se dissimulaient derrière la multitude de problèmes ayant longtemps perturbé la filière. Les barons de l'import ont réussi leurs manœuvres visant à casser la production nationale et remplacer la boîte made in Algeria par celle portant label étranger. Quelques années auparavant, les besoins du marché étaient satisfaits à hauteur de 80 %. L'année 2002 est un exemple illustratif : la production nationale oscillait entre 50 000 et 60 000 tonnes, avec 2 milliards de dinars pour les exploitants agricoles et le double pour les usines de transformation. La déperdition de la filière a commencé à se faire sentir à partir de 2003. En effet, jusqu'à 2005, les 17 usines de transformation, implantées à travers le pays, n'arrivaient pas à dépasser le seuil des 25 000 tonnes, alors que leurs capacités de transformation cumulées dépassent les 160 000 tonnes. Aujourd'hui, sur ces 17 usines, dont la plupart sont implantées à l'est du pays avec une part de 80 % de la production nationale, seulement une dizaine sont encore en activité. A Annaba, la campagne 2006/2007 s'est soldée par une production de seulement 530 000 q de tomate fraîche, au moment où on avait tablé sur 850 000 q. Les aléas climatiques et autres contraintes ont fait perdre à la wilaya plus de 320 000 q, avec un rendement de 140 q à l'hectare. Pour ce qui est de la transformation, seulement 4 500 tonnes de double-concentré de tomate ont pu être réalisées. « Au niveau de notre région, qui représente 80 % de la production nationale, les superficies agricoles destinées à la filière de la tomate industrielle ont sensiblement chuté. Se débattant dans d'insurmontables problèmes, en plus des aléas climatiques, les agriculteurs ont dû abandonner cette filière pour jeter leur dévolu sur celles des céréales et du tabac », a indiqué un agriculteur de Annaba. Même en matière de rendement, la faiblesse s'accentue d'année en année. Avec une culture en sec, il est de l'ordre de 200 q/ha et de 600 q/ha en goutte-à-goutte, au moment où de l'autre côté de la frontière, avec le même système d'irrigation, le rendement à l'hectare dépasse souvent les 1 200 q/ha. Les mesures incitatives, prises par l'Etat pour aider agriculteurs et transformateurs n'ont, semble t-il, pas réussi à sauver la filière. « Bien qu'il y ait eu une prise de conscience de la part des pouvoirs publics, elle est un peu tardive. Le soutien de l'Etat à l'agriculteur de 1,5 DA/kg et 1 DA/kg, accordé au transformateur, et un prix minimum garanti à la livraison de la tomate fraîche fixé à 4,5/kg DA, n'ont pas porté leurs fruits », a souligné Kamel Djabri, membre de la Chambre d'agriculture de Annaba. Selon cet ingénieur en aménagement rural, rares sont les agriculteurs qui ont pu bénéficier des 16 000 DA à l'hectare. Cette somme est accordée par l'Etat à titre d'aide, si l'itinéraire technique est rigoureusement suivi pour la culture de la tomate en hybride. Pour celle fixée, cette aide est de l'ordre de 11 000 DA à l'hectare.