Le salut écologique tant attendu par les spécialistes n'interviendra pas de sitôt. L'adoption par le gouvernement d'un texte de loi reportant, pour deux ans supplémentaires, la décision interdisant l'extraction des matériaux alluvionnaires a compromis l'espoir des écologistes et chercheurs. « C'est une catastrophe ! », clament-ils. La mesure provoquera un grave déséquilibre de l'écosystème. C'est ce que confirme Yacine Hemdane, spécialiste en dynamique côtière et sous-marine. « Le report de la mise en œuvre de la mesure interdisant l'extraction du sable des oueds est très grave. Son impact sur l'environnement sera catastrophique », martèle-t-il. Et d'expliquer : « La majorité du sable qu'on retrouve sur le littoral provient des oueds exoréiques débouchant vers la mer. Ce sont les sédiments charriés par les eaux des oueds qui forment en grande partie les plages. » « Grâce aux différents courants marins (transversaux et longitudinaux), ce sable est distribué à travers les mers. L'opération prend beaucoup de temps (plusieurs années) », déclare-t-il. Selon lui, les ponctions de sédiments au niveau des oueds à l'amont empêchent le sable d'atteindre la mer et, par conséquent, ceci risque de générer une érosion côtière, une avancée de la mer et une inondation littorale. L'autre conséquence de ce prélèvement des agrégats à l'amont est la disparition des dunes littorales. « Cette perturbation de la dynamique sédimentaire des oueds provoquée par la surexploitation des sédiments fluviatiles (des oueds) va certainement faire disparaître non seulement les plages mais aussi les dunes littorales (cordon dunaire). Ces dunes jouent un rôle très important contre les inondations littorales subites (lors des tempêtes) et progressives », ajoute-t-il. Déficit en sable sur le littoral Selon Yacine Hemdane, le littoral algérien souffre actuellement d'un déficit en sable. La prorogation du moratoire en question aggravera, indique-t-il, la situation. Les répercussions d'une telle situation seront également fâcheuses : avancée de la mer, érosion des berges des oueds (donc les infrastructures de base, comme les ponts seront aussi menacées), disparition de plusieurs plages, perturbation des courants marins, très important dans l'équilibre littoral et la perturbation de la faune et la flore marines. Pour sa part, Aït Amara Ahcen, directeur de l'assainissement et de la protection de l'environnement au ministère des Ressources en eau, met en avant les dangers d'une exploitation massive et anarchique des oueds. Ce phénomène provoque, à la fois, l'appauvrissement de la masse filtrante au niveau de la nappe phréatique, la disparition totale de la nappe et la vulnérabilité de cette dernière à la pollution. Il perturbe également la nappe. « L'extraction des sables des oueds va nuire dangereusement à la nappe et l'environnement », a-t-il reconnu. C'est pour éviter un tel désastre écologique que les services du ministère, précise-t-il, avait pondu le premier texte de loi interdisant l'extraction des matériaux alluvionnaires en 2005. Le problème demeure posé et le danger plane toujours…