A un peu plus d'un mois des élections municipales prévues le 29 novembre prochain, les futurs maires ne connaissent pas trop quelles seront leurs prérogatives et leur marge de manœuvre dans la gestion des APC. C'est à un saut dans l'inconnu que les pouvoirs publics les invitent compte tenu du fait que le principal texte régissant leur fonction risque à tout moment d'être changé. Le code communal en l'occurrence est en chantier depuis au moins six années. Le ministre de l'Intérieur, Yazid Zerhouni, avait soutenu, il y a plus d'une année, que ses services avaient mis au point la mouture qui n'attendait qu'à être discutée et adoptée en conseil de gouvernement et celui des ministres. C'était du temps de l'ex-chef de gouvernement Ahmed Ouyahia. Entre temps, Abdelaziz Belkhadem, qui avait constitué un Exécutif « parallèle », a concocté un autre projet par l'entremise de sa commission exécutive et qu'il a soumis au président de la République. Interrogé par nos soins, le patron du FLN, nommé chef du gouvernement, avait répliqué qu'il allait collationner les deux textes pour en adopter le meilleur. Cela fait seize mois — ce fut en juillet 2006 — que Belkhadem a fait cette déclaration et point de code communal encore… Arrière-pensées politiques Le comble est que les différentes dispositions de ce code version FLN ont été rendues publiques. Il y est notamment question de l'adoption d'un mode de scrutin majoritaire à deux tours permettant de « responsabiliser le parti vainqueur dans la gestion des communes » (sic). Le projet prévoyait également que les comités de quartiers et de villages, et plus généralement la société civile, soient associés à la gestion.Au-delà de la pertinence juridique et des arrière-pensées politiques du texte du FLN, on se demande pourquoi son concepteur, qui dirige dans le même temps le gouvernement, n'a pas jugé utile de l'adopter via le cheminement institutionnel classique ? Quel est, en outre, le sort réservé au projet préparé par le ministère de l'Intérieur, dont Zerhouni, attendait juste qu'il soit programmé en conseil de gouvernement ? Pourtant, l'urgence de la réforme de ce code fait l'unanimité parmi la classe politique qui dénonce régulièrement la posture dans laquelle est confiné le P/APC réduit à servir de boîte aux lettres entre le wali et le chef de daïra. Pis encore, au moins 300 APC sont pratiquement bloquées à cause de défections et autres frictions politiques entre les différents partis. Résultat des courses : le gouvernement a remisé deux projets ficelés de réforme du code communal et maintient les P/PAC les pieds et les poings liés. Belkhadem s'était pourtant engagé à faire adopter l'un des deux textes avant les municipales. Mais on doit encore une fois faire du neuf avec du vieux… Et il n'est pas exclu que nos futurs maires soient invités à se mettre à niveau, dans six mois, avec le futur code communal, histoire de mettre la charrue avant les bœufs. Tout se passe comme si ce texte ne fait pas partie des préoccupations de la République tant il concerne directement la vie du citoyen. Et on peut multiplier à l'envie les exemples du laisser-aller et du blocage des institutions. Depuis le décès de son PDG, le 10 août dernier, Air Algérie, le pavillon national, n'a pas encore de pilote ! A l'heure où la concurrence fait rage dans le transport aérien, nos décideurs ne jugent pas utile de pourvoir ce poste pour la simple raison que la décision échappe totalement au conseil d'administration de la compagnie. En attendant, Air Algérie évolue en pilotage automatique… Le constat vaut également pour les sociétés de gestion des participations de l'Etat (SGP) qui, orphelines de tutelle après la suppression du conseil des participations, naviguent à vue alors qu'elles gèrent les portefeuilles des entreprises publiques. Mais c'est le projet de la révision de la Constitution qui cristallise le mieux cette incroyable mise en veilleuse des chantiers vitaux du Président. Comme une Arlésienne, « l'ex-future » Constitution passe allégrement de l'imminence au renvoi sine die, selon la conjoncture politique du moment, alors qu'elle conditionne théoriquement l'Algérie de demain. A moins que l'on ait jugé, en haut lieu, que les réformes démocratiques et autres règles de bonne gouvernance ne sont pas compatibles avec la nature du régime. C'est la seule chose qui pourrait du reste justifier cette gestion des affaires du pays par l'incantation et autres effets d'annonce.