Les échanges d'informations les plus importants entre le bureau central national d'Interpol à Alger et les autres à travers le monde concernent surtout la drogue et le blanchiment d'argent. Le cas de Hassan Hattab relève de la justice. Les demandes d'informations sont souvent basées sur des intérêts des pays qui les formulent. Ce sont des propos tenus par le directeur de la police judiciaire en marge d'une rencontre sur les missions d'Interpol. Les informations les plus demandées à la police judiciaire algérienne ces trois dernières années par Interpol concernent au premier rang la drogue, suivie du blanchiment, puis très loin vient le terrorisme. C'est ce qu'a déclaré hier le commissaire divisionnaire Rabah Ladj, directeur de la police judiciaire, en marge de la première rencontre sur la vulgarisation et l'information sur la mission d'Interpol, qui s'est ouverte à l'Institut national de la criminologie de Saoula, à Alger, et à laquelle a pris part le directeur de la région Moyen-Orient-Afrique du Nord pour l'organisation, Houssam Abdellatif. Pour M. Ladj, Interpol n'est qu'un instrument de transmission de données ou d'informations à travers les 187 pays membres de l'organisation. « Sa mission cesse dès l'arrestation de la personne visée par les recherches », a-t-il déclaré. Interrogé sur les cas de terroristes algériens demandés par des Etats membres de l'organisation policière, à l'image de Mokhtar Belmokhtar ou encore Hassan Hattab portés sur la liste des personnes et des organisations terroristes établie par l'ONU dan le cadre d'une résolution du Conseil de sécurité consacrée à la lutte contre le financement du terrorisme, le conférencier a expliqué qu'il existe « un principe universel que l'Algérie applique avec rigueur, celui de ne pas extrader ses ressortissants, mais de les juger pour les faits qui leur sont reprochés ». Invité à plus de détails, le commissaire, après avoir évité la question, a lancé : « Notre mission s'arrête dès que la personne est arrêtée. Dans le cas de Hassan Hattab, puisqu'il s'est rendu, c'est à la justice qu'il faudra demander s'il va être jugé ou non. » Traçabilité A propos du nombre d'Algériens réclamés par des pays membres d'Interpol et celui demandé par l'Algérie à ces derniers, le divisionnaire n'a donné aucune information, précisant n'avoir pas été préparé à de telles questions. « C'est ce matin que j'ai décidé d'animer ce point de presse et je n'ai à aucun moment pensé que vous alliez m'interroger sur ce volet. » Sur insistance des journaliste, M. Ladj a déclaré : « Ils sont nombreux, mais je ne peux vous dire combien, parce que le nombre évolue quotidiennement. » Il notera toutefois qu'« actuellement aucune demande relative à un terroriste algérien n'a été déposée au bureau central national (BCN) d'Interpol à Alger. Il y a beaucoup plus des affaires liées à la drogue, au blanchiment d'argent et à la criminalité organisée ». Abordant le volet de la coopération et de l'échange d'informations entre les pays membres d'Interpol, le divisionnaire a affirmé que ces opérations sont souvent basées sur des intérêts. « Avec la rive nord occidentale de la Méditerranée, les demandes se concentrent surtout sur le trafic de drogue et le blanchiment, du fait que le premier fléau leur pose un vrai problème de santé publique et le second nuit sérieusement à leurs finances. Etant donné que l'Algérie est considérée comme un pays de transit, elle constitue pour eux un rempart contre ces phénomènes, notamment en matière de lutte contre le trafic de cannabis. Les demandes que nous recevons de France, d'Italie ou d'Espagne convergent en général presque toutes vers ces affaires dans le but d'appuyer leurs investigations pour identifier les auteurs ou de remonter les filières. » Le directeur de la police judiciaire a ajouté qu'avec l'apparition de nouvelles formes de criminalité, notamment financière, l'Algérie devient demandeur d'informations. Avant, a-t-il précisé, les instruments légaux « qui existaient ne permettaient pas d'aller au bout des enquêtes, mais aujourd'hui, il est important de remonter la traçabilité des fonds par exemple détournés et transférés vers des comptes à l'étranger pour y être investis. Les exemples de ce type de criminalité ne manquent pas et la presse a fait état de certains d'entre eux ». M Ladj a beaucoup insisté sur les actions des magistrats, dont les investigations viennent en aval du travail des policiers. « Il est nécessaire que les magistrats se rapprochent de leurs confrères étrangers pour coordonner leurs efforts et échanger leurs informations dans le cadre des commissions rogatoires afin de pouvoir confisquer et rapatrier les fonds détournés de l'Algérie. » Le divisionnaire Benyamina Abed, chef du BCN d'Interpol à Alger, n'a pas voulu lui aussi faire état du nombre des Algériens recherchés par Interpol, encore moins parler du cas de Hassan Hattab, recherché par l'ONU, et qui s'est rendu récemment. Comme son collègue, il a tout bonnement demandé aux journalistes de poser cette question au ministère de la Justice. De son côté, Houssam Abdellatif, direction de la région du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord pour Interpol, a mis l'accent sur l'importance des relations bilatérales entre les pays en matière d'échange d'informations ou d'arrestation de criminels. « Ce sont ces relations qui font que la coopération entre les pays donne des résultats ou non. Je cite l'exemple des USA et de l'Iran dont les relations ne sont pas au beau fixe, il est difficile de mettre en exécution une demande de part et d'autre alors qu'ils sont tous les deux membres d'Interpol. » Affirmation que Ladj Rabah a confirmée, en précisant à propos d'une question relative au mandat d'arrêt lancé contre Abdelmoumen Khalifa : « A l'époque, il n'y avait aucun cadre juridique qui aurait permis l'exécution de ce mandat. Il faut du temps pour mettre en place ces instruments parce qu'ils sont très importants dans le travail de l'organisation. » A signaler que ce point de presse a été animé en marge de la rencontre de deux jours ayant débuté hier à l'école de police de Saoula destinée aux chefs et officiers de la police judiciaire des trois corps de sécurité : la police, la gendarmerie et l'ANP. Lors des travaux, fermés aux journalistes, les participants s'informeront des activités d'Interpol, ses missions, ses prérogatives, le rôle des BCN, l'importance de la base de données de la criminalité et des notices d'Interpol. Un débat sera ouvert avant que la rencontre ne prenne fin aujourd'hui avec des recommandations.