Le jury du Festival de Rome, qui s'est achevé samedi soir, a primé beaucoup de films : Juno de l'Américain Jason Reitman, Hafez de l'Iranien Abolfazi Jalili. Tout en oubliant le beau film turinois L'Uomo Privato de Emidio Greco. Rome (Italie). De notre envoyé spécial L'intérêt de Rome pour le cinéma ne date pas d'hier. D'où ce festival désormais annuel, qui décerne de nombreux prix et de sous-prix et qui essaye de confirmer la montée créatrice du cinéma national. Hélas, pendant ces dix jours à Rome, on a surtout l'impression que le Festival est surtout axé sur l'Amérique. On envisage mal désormais, comment le festival de Rome, plus que celui de Venise et de Cannes, où le programme est vraiment haut de gamme, pourrait se passer de son tapis rouge sur lequel tous les soirs défilent les stars venues d'Amérique. A Rome, Hollywood écrase Cinecitta et tout le monde semble être satisfait de la situation. Attachez vos ceintures : voilà un raz de marée de Romains béats d'admiration devant un Tom Cruise qui passe en roulant des épaules. Les « monstres sacrés » comme l'écrit la presse italienne telles que Jane Fonda, Merryl Streep et compagnie évoluent ainsi en plusieurs temps et tout Rome, médias et public confondus, est suspendue à leur moindre geste. Hallucinant ! Cette attitude néocolonisatrice d'Hollywood sur Rome n'est pas une réussite du festival, il faut bien l'avouer. Le public romain pendant ce temps boude les productions nationales : à la sala Lotto, jeudi soir, des huées et des sifflements ont accueilli le (très) beau film turinois L'Uomo Privato, réalisé par un cinéaste de grand talent Emidio Gréco. Cela dit, il ne faudrait pas non plus brûler tous les films américains projetés à Rome. Trois au moins méritaient les honneurs. Youth without Youth de F. F. Coppola, Accross the universe de Julie Taylor sur la stupéfiante saga musicale des Beatles et surtout ce chef-d'œuvre signé Sean Penn, où chaque plan est une merveille : Into the Wild. Dans un festival normal, avec un jury normal, Sean Penn aurait décroché la timbale. Il s'agit de l'histoire d'un jeune Américain de 23 ans, qui un jour à peine sorti de l'université a pensé que le plus sûr moyen de connaître le bonheur c'est de tout foutre en l'air, de donner à Oxfam (organisme de charité), tout ce qu'il possède et d'aller vivre à l'état sauvage (Into the wild) dans les profondes forêts de l'Alaska. Voilà ce qui arrive quand on aime les livres de Jack London.