Si un qualificatif devait être donné au président Bouteflika hier à l'ouverture de l'année judiciaire, ce serait celui d'être déterminé à rester « agrippé » à sa politique de réconciliation nationale et aux orientations économiques du pays. Sur le plan politique, la réconciliation nationale se décline comme étant le cheval de bataille de ses deux mandats, il ne saurait en découdre au risque de faire aveu d'échec. Dans son traditionnel discours, à l'occasion de l'ouverture de l'année judiciaire, le premier magistrat du pays a fermement assuré que « seul le choix de la réconciliation nationale est la voie à suivre ». Et de souligner que les actes terroristes perpétrés en Algérie « sont des actes purement criminels sans aucune essence politique ». Le chef de l'Etat estime que « ces attentats aveugles n'interviennent pas pour dénoncer ou réfuter une politique donnée ou une quelconque situation politique, ce ne sont que des actes criminels visant l'effusion du sang des innocents, sans motivation religieuse ou morale ». Le Président ajoute : « Ces actes visent à démolir, à semer la terreur et le chaos et à porter atteinte à la stabilité de notre peuple, qui a adopté une position immuable à l'égard de la tragédie nationale et de ses répercussions. » Continuant dans sa plaidoirie gratifiant son programme politique, Abdelaziz Bouteflika considère que la politique de réconciliation nationale a « permis au pays de renouer avec la paix et la stabilité, et de se lancer dans un processus de développement global dans tous les domaines, tout comme elle a offert des opportunités de drainer les investissements étrangers et d'assurer une vie meilleure pour tous les Algériens ». C'est ce processus de développement, dira-t-il, qui est visé par ceux « appartenant à des cercles de l'intérieur comme de l'extérieur qui nourrissent la haine envers l'Algérie et veulent nuire à ses intérêts ». Une phrase introduisant son propos sur son attachement aux choix économiques engagés ces dernières années, et semblant répondre à une conjoncture marquée par de sévères critiques dont a fait l'objet l'orientation économique du gouvernement. « Notre pays est absolument déterminé à continuer son processus de développement quels que soient les obstacles et les difficultés », en précisant ceci : « Malgré ceux qui voient dans cette politique un obstacle qui fait barrière à leurs desseins et appétits opposés aux intérêts de leur pays et leur peuple, aussi différente soit leur appartenance ou leur affiliation. » Une précision qui intervient quelques jours seulement après la fracassante sortie de Ahmed Ouyahia accusant le gouvernement de servir à travers ses choix économiques des lobbys et des intérêts étrangers. On ne peut placer la déclaration du président de la République, premier garant des orientations du gouvernement, que dans le sillage de la querelle naissante entre membres de l'Alliance présidentielle. Belkhadem, ayant de tout temps assuré n'être que le coordinateur entre le gouvernement et le président de la République, est dédouané par Bouteflika qui semble avoir choisi cette sortie pour confirmer sa parfaite assomption de la politique et des orientations économiques de l'heure. Le fait de souligner qu'il avancera dans son programme quelle que soit l'appartenance politique de ses détracteurs marque sa détermination à ne pas faire cas de ses « anciens » soutiens. Ouyahia l'a même compris le jour où il a été évincé de la chefferie du gouvernement, et sa récente sortie médiatique signe une nouvelle configuration des rapports avec l'Exécutif. Ces échanges de politesse sonnent-ils le début de la guerre de succession ? Point de salve directe dans le discours présidentiel, mais des propos qui affirment une volonté d'aller de l'avant dans sa démarche sans tenir compte des critiques des uns et des autres. Le président de la République a d'ailleurs souligné en guise de choix prioritaires que l'Etat « est décidé à lutter contre le terrorisme et la corruption et s'est engagé à œuvrer sur les plans national et international — et ce dans différents domaines économiques et sociaux – à créer les conditions d'un climat nouveau favorable à la coopération et l'entraide ». Il appellera, à cet effet, à faire preuve de vigilance en notant que « la vigilance et la prévention du terrorisme sont désormais une obligation pour les Algériens et les Algériennes fidèles à leur pays, notamment les parents des personnes égarées, dont les enfants, inconscients des dangers qui les guettent, se font tuer et tuent des innocents pour des objectifs qui ne sont pas les leurs ».