La direction palestinienne, les instances de sécurité et les mouvements politiques ont réussi un grand pari : celui d'avoir su éviter que la disparition du président Arafat entraîne le chaos dans les territoires. Le challenge n'était pas facile à relever en raison de la nature atomisée, disparate (idéologiquement) des mouvements résistants palestiniens. Du fait du symbole qu'il représente pour les Palestiniens, la disparition attendue de Yasser Arafat a laissé un grand vide à la tête de l'Autorité palestinienne et de l'OLP et a, rappelle-t-on, suscité la crainte d'affrontements entre mouvements palestiniens et faisant planer la menace du chaos sur les territoires. Malgré leurs divergences, les représentants de 13 mouvements palestiniens de la coalition des forces nationales et islamiques ont multiplié les contacts et les rencontres extraordinaires, depuis l'hospitalisation de Yasser Arafat, le 28 octobre dernier à Paris, pour convenir d'une démarche pour assurer une transition sans heurts. La première de ces réunions s'est tenue le 4 novembre dernier à Ghaza, dans les locaux du Parlement palestinien. Durant cette réunion, les instances de la sécurité palestinienne et les mouvements palestiniens ont montré un haut niveau de coopération pour contrôler la situation, faire régner l'ordre et préserver les intérêts des Palestiniens. Présents à ces réunions, les islamistes radicaux du Jihad islamique et du Hamas (qui font partie des mouvements sur lesquels les autorités palestiniennes comptent pour écarter le risque de l'implosion) se sont également dits prêts à assurer le succès de la période de transition et à contribuer à jeter les jalons de l'après-Arafat. Le porte-parole du mouvement Hamas, Sami Abou Zahri, a souligné ainsi, à la veille de sa première rencontre avec M. Qoreï, le chef du gouvernement palestinien, « la nécessité de préserver l'unité nationale durant cette période extrêmement sensible ». La passation de consignes « rapides » et non entachée d'une quelconque contestation effectuée à différents niveaux de l'OLP, du Fatah (mouvement de Yasser Arafat actuellement majoritaire au Parlement) et du gouvernement pour pallier la vacance du pouvoir a, par ailleurs, contribué de manière significative à rassurer la population palestinienne et a prouvé la fiabilité du système politique palestinien. En attendant l'élection d'un successeur à Yasser Arafat, l'intérim sera assuré par le président du Conseil législatif palestinien, Rawhi Fattouh. Selon la Constitution palestinienne, cet intérim durera 60 jours. Une période à l'issue de laquelle seront organisées des élections présidentielles. Même si M. Arafat n'a, jusqu'à la fin, jamais voulu désigner de dauphin pour lui succéder, Mahmoud Abbas, Ahmad Qoreï et Farouk Kaddoumi, les nouveaux hommes forts de l'OLP, ont dans l'ombre du Raïs, acquis une longue expérience de la gestion politique des territoires palestiniens qui devrait faciliter la transition. La disparition de M. Arafat a néanmoins permis surtout le retour sur le devant de la scène palestinienne de M. Abbas (alias Abou Mazen), 69 ans. Alors qu'il avait quasiment plongé dans l'oubli après sa démission comme Premier ministre en septembre 2003, à la suite de profondes divergences avec le chef palestinien, Abou Mazen est perçu aujourd'hui par tous comme le futur successeur du « vieux ». Cela y compris par les islamistes radicaux du Jihad islamique.