La première cause des accidents de la circulation, n'est pas l'état de la route ou des véhicules, c'est la mauvaise conduite », lance M. Babouche, directeur d'auto-école à Tizi Ouzou, en activité depuis 1981. Les « auto-écoles honnêtes sont en train de disparaître. Devant la dégradation des conditions d'exercice, certaines écoles sont en train de vendre le permis de conduire, au lieu de former. Les candidats choisissent l'école qui offre plus de facilités financières, cela toujours au détriment d'une vraie formation », ajoute M. Babouche, ancien président de l'association des auto-écoles de la wilaya de Tizi Ouzou. Il dénonce le règne du tarif au forfait, qui satisfait le candidat, mais qui jette le discrédit sur les professionnels du secteur et aussi sur les examinateurs. « La réglementation exige de rendre les résultats juste après l'examen, et non pas plusieurs heures plus tard. Il est impératif de moraliser le secteur, si l'on veut que le permis de conduire sanctionne réellement une formation optimale du candidat », conclut notre interlocuteur. L'anonymat de l'examinateur a été instauré par l'administration, mais l'association demande d'étendre cette mesure et de remettre les dossiers des auto-écoles le jour des épreuves. M. Rabehi, actuel président de l'association, met l'accent sur le surnombre des auto-écoles, un phénomène apparu ces deux dernières années, et qui handicape lourdement ce secteur. « On a assisté à la distribution excessive des agréments, sans respect de la norme qui mentionne une auto-école pour 6000 habitants », nous dit-il. Il cite des chiffres : « Il y a 30 auto-écoles dans la daïra d'Azazga, au lieu de 15. Il y en a 71 à Tizi Ouzou, au lieu de 24 ». Résultat, un manque à gagner pour l'ensemble des écoles, une baisse des tarifs et du niveau d'apprentissage. Une bonne formation coûterait 10 000 DA à l'élève. Aujourd'hui, les tarifs tombent jusqu'à 5000. Au lieu des 15 leçons de conduite requises, l'élève n'en fait que 5 ou 6. Une leçon qui devrait durer 45 mn, tombe à 15 mn, vu que le moniteur emmène trois candidats à la fois et les fait passer au volant un quart d'heure chacun. Une formation au rabais qui produit des chauffeurs approximatifs. « Nous n'avons plus le choix. On peut fermer nos écoles du jour au lendemain », disent des anciens directeurs d'auto-écoles, qui n'arrivent plus à suivre la dévaluation qui frappe leur métier. D'où vient cette inflation d'écoles ? L'on indexe l'administration de wilaya, qui a ouvert les vannes des agréments sans tenir compte du terrain, des normes et des règles minimales d'accès à ce métier. Ils sont 250 à exercer actuellement dans la wilaya de Tizi Ouzou, et plusieurs dizaines de dossiers attendent l'agrément au niveau de l'administration des transports. Il suffit de présenter un dossier administratif et un certificat d'aptitude professionnelle et pédagogique (CAPP). « L'administration ne respecte pas l'exigence réglementaire de deux années d'expérience effectives en tant que moniteur, avant de demander l'agrément en tant que directeur d'auto-école », dénonce M. Rabehi. L'on apprend que le diplôme est obtenu en trois mois, pour 15 000 DA, au niveau d'un centre de formation à distance. Il suffit d'avoir 21 ans, un niveau de 9e AF et un permis de conduire qui a 2 ans d'âge. « Ce sont trois semaines de formation en trois mois, et au final, on obtient des formateurs qui ne savent pas démarrer une voiture », lancent les « anciens ». L'on soulève, par ailleurs, le problème des circuits d'apprentissage. « Au chef-lieu de wilaya, il y a un seul circuit des manœuvres, à l'intérieur de la station des fourgons et un autre pour la circulation. Ils sont insuffisants et inadaptés », conclut le président de l'association.