Deux semaines après la dernière offensive contre la ville de Falloujah, le bilan est plutôt maigre pour les Américains. L'attaque de la ville que l'on disait insurgée contre l'occupation américaine s'est soldée par la mort d'un millier de combattants - qualifiés de rebelles par Washington et le gouvernement Iyad Allaoui - dont près d'une dizaine d'étrangers, des non Irakiens, selon le commandement américain. Quant à Abou Mossaâb Zarqaoui, quelques jours avant la fin de l'offensive le Premier ministre irakien a tout simplement reconnu qu'il avait réussi à fuir avant la fin des opérations. Alors que l'armée américaine annonçait que 10 000 hommes appuyés par 2000 militaires irakiens avaient réussi à contrôler la totalité de la ville, l'ennemi public recherché par les Américains, qui ont mis sa tête à prix, a appelé à la résistance ailleurs dans d'autres bastions sunnites. L'opération, lancée le 14 octobre dernier avec la prise en étau de la ville qui a vu la participation de 20 000 soldats américains et irakiens, a été de grande envergure puisqu'elle a engagé les forces terrestres et l'aviation. La veille de l'encerclement de Falloujah, Iyad Allaoui a menacé la population de lancer les troupes si elle ne livrait pas l'ennemi public n°1 dont la tête est mise à prix à 20 millions de dollars. Une véritable machine de guerre contre la ville martyre est juste après mise en action, des moyens considérables sont déployés dans ce qui allait être la plus grande offensive militaire américano-britannique depuis avril dernier. La plupart des habitants de la ville avaient fui depuis longtemps les lieux. Ainsi, dans la nuit du 4 au 5 novembre, il y a eu 12 raids aériens en cinq heures qui ont pratiquement déversé un véritable déluge de feu sur Falloujah. Devant un tel déploiement de moyens militaires des forces occidentales d'occupation en Irak, aussi bien au sol que les moyens d'écoute dans le ciel et sur terre où pratiquement aucune communication radio, téléphonique ou connexion internet dans le camp des insurgés de Falloujah ne pourrait passer inaperçue pour le système d'espionnage électronique mis en place par les Américains et les Britanniques via les stations terrestres et les satellites d'observation militaires et civils, on se demande comment Abou Mossaâb le Jordanien n'a pas été localisé avec précision. On se souvient qu'en Afghanistan, la propagande militaire américaine affirmait que rien ne pouvait lui échapper grâce à la télédétection. Et que l'on pouvait déterminer la taille des individus tels que Oussama Ben Laden et ses lieutenants et que leur moindre geste était suivi de près... Aujourd'hui contre celui que les Américains présentent comme étant lié à Al Qaîda et agissant en Irak, il faut sans doute rappeler que, les 19, 22 et 25 juin dernier, des raids aériens avaient été lancés contre les repaires supposés de Zarqaoui, une semaine plus tard une autre opération aérienne occidentale est dirigée contre une autre position virtuelle de Abou Mossaâb sans aucun résultat. En revanche, les bombardements ont fait des dizaines de victimes parmi la population. C'est donc la troisième fois consécutive que l'ennemi public des Américains en Irak a réussi à passer entre les mailles du filet supposé tendu pour sa capture ! Mieux, quelque temps après l'annonce que les soldats américains poursuivaient le nettoyage de la ville, une déclaration de Zarqaoui le Jordanien, distribuée à la presse locale et étrangère à Baghdad, appelait les Irakiens à résister dans d'autres villes contre lesquelles la coalition occidentale se prépare à lancer des offensives militaires. Un véritable pied de nez à l'occupation occidentale. Un message sonore attribué au chef supposé d'Al Qaîda en Irak « circule » également sur internet. Et tout cela devant un aveu d'impuissance implicite des Américains. A moins que les stratèges du Pentagone voient dans la cavale d'Abou Mossaâb à travers un Irak supposé étroitement contrôlé par air et sur terre, le prétexte de leur présence et de la multiplication des opérations militaires contre les villes irakiennes. Une cavale qui n'est pas sans nous rappeler celle de Oussama Ben Laden fuyant les grottes de Tora Bora en Afghanistan sous un tapis de bombes américaines en compagnie du mollah Omar, borgne de surcroît, sur une mobylette déglinguée vers la frontière pakistanaise... Une rocambolesque cavale qui laisse perplexe aujourd'hui plus d'un.