Après avoir mis en échec les différentes interventions étrangères en vue, selon elles, de les aider à se choisir un président de la République, les Libanais ont mis eux-mêmes de l'ordre dans leurs affaires pour ne retenir en fin de compte que l'hypothèse la moins improbable, en raison de la forte tension provoquée par les partis ou leurs candidats. L'élection est en train de prendre un sérieux retard, mais les points de vue semblent se rapprocher et le choix se porterait sur un autre général, le dernier étant le déjà ex-président Emile Lahoud. Effectivement, l'élection d'un nouveau chef de l'Etat a de nouveau été repoussée jeudi soir, mais une sortie de crise semble possible avec le soutien affiché de l'un des piliers de l'opposition, le chrétien Michel Aoun, pour l'élection du chef de l'armée, Michel Sleimane. La séance parlementaire prévue hier pour l'élection du Président a, pour la sixième fois, été reportée cette fois au 7 décembre, « pour permettre plus de consultations en vue de parvenir à un consensus » sur le nom d'un candidat, a annoncé le bureau du président du Parlement Nabih Berri. Le Liban est sans Président depuis le départ d'Emile Lahoud à l'expiration de son mandat le 23 novembre à minuit, la majorité parlementaire et l'opposition n'étant pas parvenues à s'accorder sur un nom. Peu avant l'annonce de ce nouveau report, Michel Aoun, le chef du courant patriotique libre (CPL), avait affirmé appuyer le général Michel Sleimane, le commandant en chef de l'armée libanaise, autour duquel tournent les tractations entre les deux camps depuis quelques jours, même s'il n'a pas fait acte de candidature. « Oui bien sûr, je le soutiens, et je suis très heureux », a affirmé M. Aoun, qui s'était lui-même dit candidat au poste de président. « Si la majorité le veut et que d'autres parties dans l'opposition le veulent, alors c'est bon », a poursuivi M. Aoun, allié du puissant Hezbollah chiite, chef de file de l'opposition. « Il y a des obstacles constitutionnels qui devraient être levés parce que le gouvernement est illégitime », a-t-il ajouté. L'élection du général Sleimane nécessiterait un amendement constitutionnel, car en vertu de l'article 49 de la Constitution, il est interdit aux hauts fonctionnaires de devenir chef de l'Etat, sauf s'ils démissionnent de leur poste deux ans avant l'élection. Dans ce cas, le gouvernement doit présenter l'amendement au Parlement. Mais le cabinet de Fouad Siniora est considéré comme illégitime par l'opposition depuis la démission des ministres chiites du gouvernement en novembre 2006. Mercredi, la coalition au pouvoir avait proposé le nom du général Sleimane pour mettre fin au blocage, précisant être prête à ne plus s'opposer à un amendement à la Constitution. Le Hezbollah avait lié la candidature du chef de l'armée à l'approbation de M. Aoun. La présidence est réservée, selon la tradition, à un chrétien maronite. Depuis sa nomination à la tête de l'armée en 1998, le général Sleimane a su garder ses troupes unies et s'est efforcé de maintenir l'institution militaire à l'écart de la lutte pour le pouvoir qui divise la classe politique libanaise. Bien que certains l'accusent d'être lui aussi un allié de Damas, le général Sleimane est resté neutre lors de la crise autour de la présidentielle, appelant ses troupes après le départ de M. Lahoud à ignorer les disputes politiques. L'élection et la réélection de l'ex-président Emile Lahoud, également ancien chef de l'armée, avaient requis en 1998 et 2004 des amendements imposés par la Syrie, la puissance de tutelle de l'époque. Un grand pas peut être fait dans le sens d'un plus grand rassemblement des Libanais. A condition toutefois qu'il y ait une réelle volonté politique de tous les acteurs libanais.