L'Afrique, ce n'est pas que les tam-tams, le sida et les conflits ethniques. L'Afrique, ce sont aussi des histoires époustouflantes, accablantes, insolites, qui n'ont rien d'un conte vaudou. Amour compromis, éditions La Bruyère, nous le rappelle et nous plonge dans une réalité ordinaire, quoique souvent ignorée. Une famille est écrasée par la disparition de l'un de ses enfants, un petit garçon emporté par les griffes d'un faucon. Après des jours et des semaines de recherches, il a fallu se résigner à la triste réalité : la famille Danssou ne reverra plus son unique garçon. Du moins, le croit-on. Tant bien que mal, il faudra reprendre le cours de la vie. Et plutôt mal que bien, la petite famille restera accrochée à ce sinistre souvenir. Ablavi, qui n'avait que 5 ans lors de la disparition de son frère, surmontera visiblement plus facilement cette catastrophe. Des années passeront lorsqu'elle rencontrera l'homme de sa vie, après plusieurs déceptions. Un beau jeune homme vigoureux qui vit avec ces parents, âgés et très malades. Cette belle histoire d'amour efface quelque peu le sombre souvenir. Du moins, jusqu'au jour où le jeune couple décide d'officialiser sa relation et que les deux parents se rencontrent alors que la mère du jeune homme est mourante. Cette dernière avoue, avant de rendre son dernier souffle, que son unique fils était une bénédiction du ciel. Il avait été retrouvé flottant au bord d'une rivière et il a été recueilli et élevé avec beaucoup d'amour. Cette révélation atterre les Danssou. Lorsqu'ils avaient rencontré l'amoureux de leur fille, ils avaient été particulièrement troublés, sans savoir la raison. Et voilà que la vérité jaillit comme un éclat de lumière, ravivant la douleur de la catastrophe, en même temps qu'elle atténuait cette vieille douleur. Pour la jeune fille, la terre s'arrête de tourner. Heureuse de retrouver son cher petit frère, elle est pourtant accablée, une fois de plus, ses amours sont compromis. Le jeune homme, pour sa part, se demandait : « Comment l'homme avait-il pu ainsi se laisser entraîner hors de son propre paradis à l'heure où la vie l'invitait au bonheur ? » La voix du Royaume continuera pour toujours à lui hurler : « Retourne à cet os et croque-le jusqu'à ce que le vent ne lève la poussière et ne te recouvre de ce dont tu ne te relèvera point. » Ce fait divers avait fait la une des journaux. L'auteur s'est senti forcé à sortir du silence et « à inscrire au mieux ce dont l'histoire ne se pouvait, ne se devait ou ne se permettrait à jamais d'oublier ». Né au Togo en 1955, Alexandre Pothin Agbétrobu voulait devenir prêtre. Mais « beaucoup sont appelés, peu sont élus ». Renonçant à sa vocation, il va poursuivre ses études en France et se fait rattraper par la dévorante envie d'écrire. Ou peut-être de témoigner.