Mercredi 5 décembre. Maison de la culture Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou. Un huissier de justice, accompagné d'une escouade de policiers se présente au domicile de Abderahmane Hacène L'hadj, ancien directeur du même établissement et ex-directeur de la Cinémathèque d'Alger dans le but de l'expulser de son domicile. Le mobilier et les effets personnels sont entassés sur le trottoir. L'arrêt d'expulsion rendu par la chambre administrative près la cour de Tizi Ouzou le 12 juin 2006 venait d'être exécuté « après maintes demandes de surseoir à la décision de justice », a affirmé Hassan L'hadj, serein. Les voisins se sont mobilisés pour le soutenir et les curieux marquent un temps d'arrêt devant cette famille qui s'est installée sur la voie publique. Entre colère et indignation, les sentiments sont partagés. Hacène L'hadj, âgé de 65 ans, est docteur d'Etat en sciences de l'art et ancien moudjahid. Le statut de l'habitation en question est sujet à controverses. Pour son occupant qui est là depuis 1995 « ce n'est pas un logement de fonction qui appartient à la maison de la culture. Quand bien même c'était le cas, mon épouse est fonctionnaire de la même institution et moi-même j'étais directeur de la Cinémathèque d'Alger avant que le ministère de la Culture ne me suspende de mes fonctions ». Pour rappel, le département de Khalida Toumi l'a suspendu de ses fonctions l'année dernière « pour manquement à l'obligation de réserve », après qu'il eut publié le 4 février 2007 dans le quotidien Horizons une lettre ouverte au président de la République dans laquelle il a fait état de sa situation et en dénonçant « l'indifférence affÓichée par le ministère de la Culture à l'égard d'un homme qui a servi loyalement l'Etat et le pays ». Le statut juridique du logement est difficile à cerner. La partie sur laquelle il est édifié n'appartiendrait pas à la maison de la culture. Un arrêté du wali de Tizi Ouzou en date du 21 février 2005 n'a pas intégré ce logement dans le patrimoine de cette institution culturelle. Le PDG du centre d'études et de réalisation en urbanisme (l'URBAB) confirme dans une correspondance en date du 3 févier 2007 « qu'une partie de l'assiette foncière appartient en toute propriété à l'URBAB ». Hacène L'hadj est convaincu qu'il est au centre d'une machination. Sa fille de trois ans, qui venait d'avaler un bout de pain qu'elle a partagé avec sa famille qui venait de déjeuner sur le trottoir, est agitée. Son père est, quant à lui, calme, mais aigre. « J'ai contribué à l'expulsion de la France et maintenant c'est l'Algérie qui m'expulse ». Les jours et les nuits glaciales de ce mois de décembre s'étirent. C'est l'Algérie qui tourne le dos à son élite.