Quand le feu est à la maison, le premier à revêtir l'habit de pompier doit être tout naturellement le chef du gouvernement. Ce n'est pas le cas chez nous, Belkhadem étant tout entier occupé à faire la « promotion » d'un « troisième mandat » pour le président de la République et à vanter les « mérites » de son parti alors que le pays est frappé de plein fouet par une crise sociale sans précédent : une hausse spectaculaire des prix de produits de base érode dramatiquement le pouvoir d'achat des citoyens, les toutes dernières augmentations concernent le sucre, l'huile, la semoule et les fruits et légumes. Comme elles rendent caduques les valorisations salariales décidées il y a quelques mois, ces hausses replongent les Algériens dans la pauvreté et suscitent de lourdes inquiétudes sur l'avenir. La logique aurait voulu que Abdelaziz Belkhadem soit sur la brèche et le gouvernement tout entier mobilisé afin que soient trouvées des parades aux graves effets de la flambée des prix au plan international et recherchées de bonnes solutions à la relance de la production nationale. C'est la crise sociale qui doit faire l'objet d'un vaste débat national, impliquant l'ensemble des acteurs publics et politiques, et non la question d'un nouveau mandat présidentiel, aujourd'hui prématurée, l'élection n'étant que dans seize mois et inopportune du fait de la non-officialisation par le chef de l'Etat de la décision de refonte de la Constitution. Belkhadem mélange ses deux casquettes, de chef de gouvernement et de patron du FLN, délaissant de plus en plus la première au bénéfice de la seconde, n'hésitant pas à poignarder dans le dos l'institution gouvernementale qu'il représente en plaidant pour l'affaiblissement de ses prérogatives au bénéfice du président de la République. Celui-ci aurait-il besoin d'élargir sa puissance alors que celle que lui confère la loi fondamentale en vigueur est amplement suffisante, voire même exorbitante ? Ne parle-t-on pas de césarisme présidentiel ? En réalité, Belkhadem instrumentalise la question du « troisième mandat » pour son profit personnel et au bénéfice exclusif de son parti. Il ne lui déplairait pas de se doter du statut de « dauphin » du président de la République lequel lui renverra l'ascenseur pour l'avoir aidé à se maintenir au Palais d'El Mouradia. Et son autre grand rêve est de ressusciter le FLN de « l'âge d'or », cette formation politique qui gérait d'une main de fer aussi bien l'Etat que la société, véhiculant les mêmes valeurs islamo-conservatrices que les siennes. Pour arriver à ses fins, le chef du gouvernement ne lésine sur aucun moyen. Il a déjà ameuté l'ensemble des organisations satellites du parti au risque de créer un malaise au niveau de la sphère politique. Ses propres alliés ont été déstabilisés et l'Alliance présidentielle sommée de se soumettre ou se démettre. Seul le parapluie de Bouteflika explique que rien ne semble plus arrêter Belkhadem. Les deux hommes se complètent et s'épaulent pour un seul cap : la présidentielle d'avril 2009 d'où ils comptent tirer l'essentiel des dividendes.