Alors que les médias du monde entier font de la visite, qualifiée d'historique, du président américain, George Bush, dans la région du Proche-Orient, territoires palestiniens y compris, l'essentiel de leur couverture de l'actualité mondiale, la population ghazaouie, dans sa grande majorité, n'a donné que peu d'intérêt à cet évènement. Même le mouvement islamiste Hamas, qui contrôle la bande de Ghaza depuis plus de six mois, malgré tous les efforts fournis par sa machine médiatique, Radio locale, chaîne de télévision locale et satellite, sans oublier les appels lancés à partir des mosquées qui couvrent tous les quartiers des villes et des camps de réfugiés ainsi que les voitures munies de haut-parleurs, qui, deux jours durant, n'ont pas arrêté de sillonner toutes les rues, n'a pas réussi à faire sortir grand monde dans une manifestation qu'il a voulue géante contre la présence du président Bush qualifié de criminel de guerre. Alors que ce dernier mettait les pieds sur le sol de l'aéroport de Ben Gourion à Tel-Aviv, mercredi passé, où il a été chaleureusement accueilli, le train-train de la vie pesante dans la minuscule enclave palestinienne n'a pas changé d'un iota. Une salve de roquettes artisanales tirée par des activistes palestiniens en direction de la petite localité israélienne de Sderot, toute proche de la ligne de démarcation avec la bande de Ghaza, a fait un blessé léger et quelques dégâts matériels, mais, dans la riposte israélienne qui n'a pas tardé, trois Palestiniens, une femme et deux hommes appartenant à une même famille, dont la maison située à Beit Hanoune au nord du territoire a été atteinte par un obus de mortier, sont morts. Selon des sources hospitalières, plusieurs autres personnes, dont la vie n'est pas en danger, ont été blessées au cours du même bombardement. Pour le reste de la population, la vie est devenue cauchemardesque suite à l'embargo inhumain imposé par Israël à ce territoire palestinien isolé du reste du monde, suite à la fermeture de tous les points de passage le liant à l'Etat hébreu ou celui de Rafah, point de frontière avec l'Egypte voisine. Ces fermetures privent un million et demi de personnes de tous les produits de première nécessité, y compris des médicaments. Une soixantaine de Palestiniens empêchés de quitter ce territoire pour recevoir des soins médicaux en Israël ou dans d'autres pays sont morts, depuis le putsch armé du mouvement Hamas. Si l'on rajoute la pauvreté qui ne cesse d'augmenter, le chômage, toutes les pénuries, y compris celle des hydrocarbures, les coupures de courant électrique, si fréquentes, au point qu'on pourrait penser que la modernité est en train de quitter ce lieu, à l'image des milliers de citoyens qui ont réussi à le faire d'une façon ou d'une autre à l'occasion de quelques rares ouvertures des points de passage, l'on se rend compte que vivre à Ghaza peut être plus difficile que de vivre dans une véritable prison. Toutes ces difficultés ne pèsent rien à côté de la profonde déchirure politique et sociale créée par la guerre fratricide qui oppose les deux principales forces existant sur le terrain, le Fatah et le Hamas et qui se poursuit, à ce jour, mais sous d'autres aspects. La visite du président américain n'a fait qu'approfondir encore plus les dissensions entre le mouvement islamiste Hamas et le Fatah, dont le chef Mahmoud Abbas est le président palestinien élu au suffrage universel. Alors que les responsables du Hamas ont accusé le président américain de vouloir liquider des questions-clés comme celles de la ville sainte d'Al Qods et du retour des réfugiés, les responsables de l'Autorité palestinienne, le président Abbas en tête, ont estimé que le président américain est sérieux dans sa tentative de trouver une issue au conflit israélo-palestinien, par la création d'un Etat palestinien indépendant, démocratique et viable sur les territoires occupés en 1967. A Ghaza, le chef du gouvernement Hamas a estimé vendredi que la visite du président américain George Bush prouvait sa partialité envers Israël et était néfaste pour les aspirations palestiniennes à un Etat. « Bush a donné à Israël toutes les promesses nécessaires au renforcement de son occupation (...) tout en donnant aux Palestiniens uniquement des illusions, des slogans, et des mots creux qui ne font qu'exprimer la tromperie qui a caractérisé cette visite », a déclaré Ismaïl Haniyeh à l'issue de la prière du vendredi. Après trois jours de présence, surtout en Israël pour lequel il a affiché son plein soutien, le départ de Bush n'a pas suscité de gros débats au niveau de la rue palestinienne, surtout dans la bande de Ghaza où les habitants semblent avoir d'autres préoccupations : celles de pouvoir continuer à survivre...