De graves propos ont été tenus à Londres, jeudi dernier, par l'ambassadeur du Royaume-Uni en Algérie, Andrew Anderson, à l'ouverture d'un colloque sous le thème : « L'Algérie d'aujourd'hui et de demain et relations algéro-britanniques ». Repris par le journal londonien Al Qods Al Arabi, le diplomate s'est déclaré « étonné de l'absence de dialogue » entre les auteurs des opérations suicide et les autorités. Le diplomate a conseillé au régime algérien de ne compter que sur lui-même et pas sur les conseils des autres, surtout en matière de modèle de développement, en parlant de « conseils français ». « Il faut que les autorités algériennes n'écoutent pas les conseils de parties extérieures. Elles doivent régler les problèmes internes de leur pays en faisant confiance à leurs propres analyses et solutions, sinon ce sont des agendas de leurs adversaires et ennemis qui leur seront imposés. » Poursuivant son analyse, il a précisé que « le vrai problème du pouvoir en Algérie est avec lui-même et tout ce qui peut apparaître n'est pas la réalité, parce que celle-ci est dans les coulisses. Le président Bouteflika ne doit pas renforcer sa personne en tant que président, mais plutôt l'institution présidentielle pour qu'elle soit plus représentative du peuple algérien et non pas de sa personne… ». Pour sa part, le député du Parti des travailleurs, Gordon Mercedes, président de la commission parlementaire européenne, a indiqué lors de ce colloque financé par British Petrolium et la banque HSBC : « Les opérations kamikazes d'Alger ont un lien avec les autres attentats dans les pays du Maghreb et ailleurs et qu'elles doivent avoir une relation avec la politique d'Al Qaïda dans les pays du Maghreb en tant que région ». Le professeur Anderson, spécialiste de l'Afrique du Nord, a soutenu les propos de l'ambassadeur britannique en disant que « s'il y avait un dialogue avec les auteurs des attentats kamikazes, on négocierait avec ce qui reste des groupes islamiques armés ». Ce qui a fait réagir Lazhari Bouzid, sénateur du tiers présidentiel et président de la commission du projet de révision de la Constitution au sein du FLN. « Il ne peut y avoir de dialogue avec ceux qui commettent des attentats à l'explosif dans des lieux publics. Leur traitement ne peut être que militaire et sécuritaire. Ils se sont exclus du peuple algérien, et leur agenda n'est pas algérien. Néanmoins, le président Bouteflika a ouvert le dialogue avec eux à travers des textes qui encouragent cette méthode de traitement », a-t-il répondu. Se sentant quelque part gêné, le député Gordon Mercedes est revenu pour affirmer qu'il « n'était pas venu au colloque pour dire aux autorités algériennes ce qu'elles devaient faire ou ne pas faire ». Il a précisé, toutefois, qu'en Afghanistan, la solution est sur le point d'être trouvée, puisque la recherche parmi les talibans et les pachtounes, des groupes moins extrémistes, a permis l'ouverture du dialogue. « Peut-être que le gouvernement algérien doit rechercher des groupes qui sont prêts à abandonner la violence à travers une politique de pas à pas. » A propos de l'éventualité du décès de Bouteflika ou de sa destitution, le professeur Anderson a noté l'existence « au sein du régime algérien de puissants groupes de pression militaire qui détiennent le pouvoir et un Bouteflika incapable d'imposer l'institution présidentielle comme la principale force de pouvoir. Les généraux ont encore leur mot dans le pouvoir et certains d'entre eux n'ont même pas participé à la guerre de Libération et n'ont aucune crédibilité ou légitimité auprès du peuple algérien ». Le conférencier est allé jusqu'à demander à l'assistance de reconnaître que « jusqu'à maintenant aucune installation pétrolière n'a été touchée par les attentats, exception faite de l'attaque d'un bus transportant le personnel d'une de ces compagnies étrangères, mais cela ne peut être utilisé pour dire que la stratégie des groupes armés a changé depuis. Et si un attentat contre ces compagnies pétrolières ou leurs employés serait commis, cela m'étonnerait vraiment ». A signaler que l'ambassadeur d'Algérie en Grande-Bretagne, Mohamed Salah Dembri, invité à ce colloque, n'a pas assisté aux travaux. Il a délégué une de ses conseillères pour lire sa déclaration.