Le président Bouteflika a exhorté les jeunes à « prendre en mains leur propre destin » dans une allocution lue en son nom par le conseiller à la Présidence, M. Ali Boughaz, aux assises de la jeunesse ouvertes hier à Alger. En plus clair, il est attendu de cette « conférence nationale sectorielle de la jeunesse » que les jeunes fassent part de leurs préoccupations et ambitions en termes d'accès à l'emploi, au logement, au savoir, aux loisirs et d'une manière générale au développement du pays pour en faire un « acteur clé du développement ». Convoquer des états-majors généraux de la jeunesse dans cette conjoncture particulièrement dramatique où le vécu des jeunes est partagé entre la tentation suicidaire du phénomène des harraga qui gagne de plus en plus de jeunes et les émeutes devenues le premier employeur des jeunes désœuvrés est au demeurant une initiative fort louable. Mais d'un autre côté, l'objectif assigné à cette rencontre renseigne, à lui seul, sur l'échec des politiques successives de prise en charge des problèmes de la jeunesse. Le tableau n'est, certes, pas tout noir. Mais il est aisé de constater, au regard de l'absence de perspectives qui rythme le quotidien des jeunes, que les acquis enregistrés sont en deçà des espérances et exigences de cette frange majoritaire de la société qui cultive ce cruel paradoxe de ne pas être reconnue comme telle dans les politiques successives de développement du pays. Ainsi donc ce énième rendez-vous de la jeunesse est, assure-t-on, tout dédié à la jeunesse ! Il sera question, cette fois-ci encore, d'établir un diagnostic exhaustif sur la situation de la jeunesse algérienne. Comme si les problèmes que vivent les jeunes ne sont pas connus de tous, identifiés et n'ont pas déjà fait l'objet d'une multitude de recommandations et décisions se traduisant par la mise en place de structures et d'institutions propres à la jeunesse qui ont brillé par leur inertie et leur absence sur le terrain. Les messages que les jeunes adressent en clair quotidiennement aux autorités à travers des actions de contestation et de revendications sur fond de défiance de l'autorité de l'Etat qui trouvent un terreau fertile pour s'exprimer comme on l'a vu encore tout récemment avec la grève des lycéens n'ont pas besoin de porte-voix pour être entendus, tellement ils sont prégnants et parlants. Alors, à quoi sert une conférence nationale de la jeunesse si les recommandations et les décisions qui en sortiront iront grossir la littérature abondante des engagements non tenus et des fausses promesses qui sommeillent au fond des tiroirs ? Ce dont les jeunes ont besoin aujourd'hui ce sont moins des discours de circonstances que des actes concrets. Et la meilleure manière de permettre aux jeunes de « prendre en charge leur destin » comme les y invite le président Bouteflika, c'est d'intégrer les jeunes compétences dans les postes décisionnels, à tous les niveaux de responsabilité, en assurant un transfert générationnel pacifique et naturel du pouvoir.