L'Espagne, à travers son Premier ministre J. L. R. Zapatero, a finalement déterminé et identifié avec discernement les parties concernées par le conflit du Sahara-Occidental. Aujourd'hui, l'homme fort du royaume ibérique tient un autre langage. Pour lui, le conflit qui remonte à près de 30 ans oppose le Maroc et le Front Polisario. Donc, il est clair que l'Algérie n'est désormais plus impliquée d'une manière directe ou indirecte dans ce conflit. C'est en tout cas ce qui ressort des déclarations faites par Mohamed Abdelaziz, président de la République arabe sahraouie démocratique (RASD), lors d'un bref point de presse qu'il a tenu à faire avec les journalistes algériens, avant de quitter le Palais des congrès de Saragosse, qui abrite, depuis vendredi dernier, la conférence internationale de solidarité avec le peuple sahraoui. Sans être détaillées, les déclarations du Président étaient empreintes d'optimisme, car pour lui le chemin vers le règlement de la question sahraouie se raccourcit de plus en plus sous l'impulsion de la communauté internationale toute entière. Cette dernière, qui, selon lui, mérite d'être saluée pour les efforts consentis et les actions entreprises afin qu'une fois pour toute le peuple sahraoui puisse exercer son droit à l'autodétermination et conclure le processus de décolonisation. En s'adressant aux représentants des médias algériens, Mohamed Abdelaziz n'a pas manqué de rappeler que sa réunion avec M. Zapatero était l'aboutissement et le couronnement d'une série de contacts à différents niveaux de la hiérarchie politique entre les responsables sahraouis et leurs homologues espagnols, dont la rencontre des deux secrétaires d'Etat aux relations extérieures, de la coopération, et celle de septembre 2004 qui a réuni à New York en marge de l'assemblée générale de l'ONU les deux ministres des Affaires étrangères. L'enthousiasme et l'optimisme qui se dégageaient dans sa manière de relater les points discutés avec M. Zapatero, au début de la conférence de presse, ont cédé la place au désenchantement, lorsque le secrétaire général du Front Polisario abordera les souffrances inhumaines endurées par son peuple depuis des décennies. Pour lui, le degré de dépassement et de complexité de la situation atteint dans toute la région ne tolère plus de reculades ou d'atermoiements. Une complexité qui ne rend guère, selon Mohamed Abdelaziz, la tâche facile pour Zapatero à se prononcer sur un éventuel nouveau plan espagnol à même de régler dans l'immédiat le conflit du Sahara-Occidental. « Zapatero m'a clairement signifié que l'Espagne n'a pas de nouveau plan à proposer, mais qu'elle continuera à œuvrer dans le cadre des résolutions de l'ONU et du plan Baker », a-t-il précisé. Interrogé sur l'évaluation de son entretien avec le Premier ministre espagnol ainsi que sur la possibilité qu'un règlement de la question sahraouie puisse intervenir d'ici peu, il précisera : « Il faudra attendre les jours qui viennent et des faits concrets pour mesurer le degré de sincérité et d'engagement des Espagnols. L'Espagne a une responsabilité politique dans la crise, donc a également une responsabilité pour son règlement. Tout ce que je peux affirmer est que la rencontre en elle-même est positive et utile. Elle ne s'est pas limitée à des vœux pieux. Positive, car c'est une première rencontre de ce niveau. Utile, car elle peut faire avancer les choses. Elle a réussi à débloquer une situation psychologique. » Et d'ajouter : « C'est une rencontre qui a permis à l'Espagne d'entendre notre voix et de ne pas se limiter à la version du royaume marocain. Ce dernier continue d'user de manœuvres dilatoires tendant à faire échouer les résolutions du Conseil de sécurité, notamment la 1495 du 30 juillet 2003, par laquelle il a adopté le plan Baker pour l'autodétermination de notre peuple. » Par ailleurs, le Président sahraoui a estimé que la réunion au sommet, qu'il a qualifiée d'« historique », a ouvert la porte à d'autres rendez-vous avec des personnalités politiques espagnoles de haut rang. Il a notamment cité celle devant le réunir demain avec Mariano Rajoy, secrétaire général du Parti populaire espagnol (PP) de l'ancien Premier ministre Aznar. Il sera également reçu par le secrétaire général du parti de Gauche uni, M. Llamazares. Au bout d'une semaine, il aura ainsi rencontré les premiers hommes des partis politiques espagnols les plus influents. Des rencontres considérées par le président sahraoui comme « un grand acquis et une avancée non négligeable vers le chemin de la paix ». L'on apprendra, par ailleurs, dans les coulisses du Palais des congrès de Saragosse que les mouvements populaires espagnols à travers ses comités de solidarité avec le peuple sahraoui, association des amis du Sahara, les députés, les représentants des gouvernements régionaux et autres ONG, ont convenu d'une « très » grande manifestation. Cette dernière, qui sera organisée dans quelques jours à Madrid et devra rassembler des dizaines de milliers de manifestants, a pour but de contraindre le gouvernement de Zapatero à « clarifier davantage sa position vis-à-vis du problème sahraoui. A l'issue de cette manifestation, un document lui sera remis dans lequel il est appelé à reconnaître la RASD, en recevant ses dirigeants, et à leur tête le président Mohamed Abdelaziz, en tant que chef du gouvernement et non en sa qualité de secrétaire général du parti socialiste », ont estimé nos sources. A travers cette manifestation, « la population espagnole et son mouvement associatif veulent témoigner leur désapprobation du comportement de M. Zapatero, en recevant le président Mohamed Abdelaziz, vendredi dernier au siège de son parti au lieu de la Moncloa », selon les informations recueillies dans les coulisses du Palais des congrès.