« Au point d'impact au niveau du tunnel, il y a des risques d'effondrement. Dans la partie bâtie, l'ouvrage est éventré à certains endroits et il y a des risques d'éboulement et d'effondrement », explique un élément de la Protection civile. Le feu qui avait pris dans les wagons de fuel d'un train de la SNCF suite à l'accident de jeudi matin dans un tunnel des gorges de Lakhdaria s'est éteint hier matin. Ce n'est qu'une fois que la totalité du carburant a brûlée que les flammes se sont éteintes. Cependant, hier en fin de journée, soit quelque 56 heures après la catastrophe, des colonnes de fumée se dégageaient encore des bouches d'aération de la partie bâtie du tunnel. « Cette fumée provient des planches transversales de la voie ferrée. Celles-ci ne brûlent pas rapidement parce qu'elle sont trempées dans du goudron. Il faut attendre encore quelques jours pour que la fumée disparaisse totalement », nous explique un agent de la Protection civile. Hier, les éléments de la Protection civile ont pu pénétrer dans le tunnel et constater les dégâts. Il faut dire qu'au moment fort de la catastrophe, les soldats du feu sont demeurés impuissants devant l'envergure de l'incendie. Un train transportant du carburant et qui brûle à l'intérieur d'un tunnel long de plus de 750 m suite à un télescopage avec une locomotive qui venait en sens inverse n'est pas une mince affaire pour la Protection civile. Surtout que le relief n'est pas de nature à faciliter l'intervention. En effet, ici la voie ferrée apparaît par endroits suspendue à la falaise rocheuse des fameuses gorges de Lakhdaria et disparaît en d'autres lieux en plongeant dans des tunnels qui remuent les entrailles de la montagne. Dans l'impossibilité de parvenir au site du drame, ou du moins s'en approcher, la Protection civile a été contrainte de stationner ses équipements sur la RN5, de l'autre côté de la rivière (Oued Issers). Sur place, nous avons pu constater que les secours font face à une situation extrêmement délicate. Et là, il est peut-être opportun de parler du manque de moyens dont souffre la Protection civile. Pour traverser la rivière qui ne coule pourtant que légèrement si l'on tient compte de la saison et du moment où d'habitude il y a la crue, les intervenants ont disposé en transversale une petite échelle afin de pouvoir enjamber, sans se déchausser, l'oued à un endroit où le cours d'eau s'est rétréci. Les secouristes ont dû recourir à l'usage d'un train pour retirer ce qui reste des wagons enflammés à l'intérieur du tunnel. A notre arrivée sur les lieux, ils avaient pu tirer à quelques dizaines de mètres de l'entrée ouest du tunnel un wagon dont la déformation par l'effet de la chaleur a été telle que ses roues n'épousaient plus la position des rails. A un moment, il a été impossible de le traîner plus loin et là on a senti le besoin d'une grue afin de le déplacer. Cela va certainement compliquer l'intervention des services de la SNTF, car afin de pouvoir manœuvrer et laisser passer la grue, il faut que le train dépêché sur les lieux rentre sur Thénia pour laisser passer les autres engins et ainsi de suite à chaque fois qu'il faut remplacer un appareil. Jeudi dernier, une équipe d'experts étrangers a été dépêchée sur les lieux afin de faire un diagnostic de la situation, et hier on attendait encore son retour. « Des spécialistes seulement peuvent nous établir une expertise fiable des dégâts occasionnés au tunnel. Une pareille étude va décider des suites à donner et va déterminer la procédure de prise en charge de l'ouvrage en général », a expliqué un employé de la SNTF. Un agent de la Protection civile nous a expliqué que le tunnel a été diversement atteint et cela suite à la nature de l'ouvrage et à la proximité des wagons qui brûlaient. Le compte rendu de deux officiers de la Protection civile qui sont arrivés jusqu'au point de collision du train et de la locomotive fait ressortir qu'à certains endroits il y a de sérieux risques d'effondrement de l'ouvrage. Ainsi, avons-nous appris que le long des 600 m où le tunnel passe à travers la montagne rocheuse, il y a eu des éclatements de roche dont les gravats ont totalement couvert la voie. « Au point d'impact, il reste un lot de ferraille semi-enterré par les roches qui sont tombées sous l'effet de la chaleur ; à ce niveau du tunnel, il y a des risques d'effondrement. Dans la partie bâtie, l'ouvrage est éventré à certains endroits et il y a des risques d'éboulement et d'effondrement là aussi. » Les fissures sur la partie construite de l'ouvrage sont visibles de la route et il est évident que la température aura eu raison de la résistance des matériaux utilisés dans la réalisation. « Les wagons les plus enfoncés dans le tunnel ont fondu et sont transformés en un tas de ferraille », nous dit-on. Il ressort du constat fait par la Protection civile que l'accident a sérieusement endommagé le tunnel. Cela risque bien entendu d'isoler l'est du pays de la capitale et d'avoir des retombées sur la circulation routière. En fin de journée d'hier, on était encore sans nouvelles du conducteur porté disparu. Nous avons trouvé sur les lieux des membres de sa famille venus prendre de ses nouvelles. D'après eux, des témoignages recueillis auprès des rescapés de cet accident indiquent qu'il a réussi à sauter du train. Mais on ne connaît pas la suite. Jusqu'à hier en fin de journée, aucune évaluation des dégâts n'a été fournie par les responsables. « Cela sera communiqué une fois l'expertise réalisée », nous a-t-on affirmé, mais un agent de la Protection civile s'est voulu rassurant : « Dans sa partie traversant la montagne, il n'y a pas de risque de perdre totalement ce tunnel. Il faudra peut-être décaper les parois fragilisées pour le rendre utilisable, mais on ne peut pas dire que toute cette montagne est dès lors fragilisée par le feu. La partie bâtie par contre est, elle, perdue », déclare-t-il. Les causes de l'accident n'étaient pas encore élucidées hier en fin de journée. Une enquête a été ouverte.