C'est un véritable cris de détresse que viennent d'émettre des familles victimes du terrorisme, lesquelles appellent à une prise en charge psychologique des adolescents chez qui on enregistre des taux de déperdition scolaire élevés. Ayant été élevés en l'absence du père, et parfois de la mère, ces enfants sont confrontés à des difficultés complexes. Vivant dans des familles recomposées ou dans des orphelinats, ils ont atteint un âge où leurs besoins ne sont pas que matériels. Ayant grandi en marge de toute solidarité et de toute humanité, ils sont à la merci des tentations les plus pernicieuses. S'ils dérivent vers des voies tortueuses, c'est certainement plus par manque de solidarité que par mauvaise volonté. Dans toute société, ce sont les ressorts de la solidarité qui permettent au groupe de ne pas se disloquer. Souvenons nous qu'à l'indépendance, ce sont les familles et surtout les mères qui accepteront, dans un formidable mouvement de solidarité jamais égalé, à renflouer les caisses vides du jeune Etat indépendant. Même si l'argent amassé n'a pas été utilisé à bon escient -certains en ayant hérité plus que d'autres-, il reste dans la mémoire collective ce formidable élan d'entraide. Depuis, beaucoup de misères auront atteint le coeur des enfants du peuple. Ni le Croissant Rouge Algérien, ni le ministère de la Solidarité ne seront parvenus à réduire réellement la détresse des orphelins de la tragédie. A l'heure des bilans, chacun prendra conscience de ce terrible manquement. Les blessures de l'enfance préparent les révoltes de l'adolescence. Ceux qui l'auront oublié seront les premiers à s'en mordre les doigts.