La lutte antitabac est aujourd'hui une urgence à mettre parmi les priorités de santé publique. 15 000 décès par an sont dus au tabac en Algérie. Ce sont aussi 5000 individus qui souffrent d'un infarctus du myocarde. 3000 cancers du poumon sont comptabilisés chaque année. Chaque jour plus de 15 millions de cigarettes sont consommées à travers le monde. Les pneumologues algériens lancent un appel à partir d'Oran à l'occasion des 17e journées nationales de pneumophtisiologie sous le thème « Poumon et tabac » pour faire de la lutte antitabac une priorité des pouvoirs publics et de toute la société civile. Les jeunes sont aujourd'hui la nouvelle cible de l'industrie du tabac, a expliqué le Pr Nafti, président de la société algérienne de pneumophtisiologie. 6000 cartons de Marlboro sont vendus par semaine à Alger, a-t-il indiqué à titre d'exemple. Environ 8 fumeurs sur 10 ont commencé avant 18 ans, a-t-il signalé. « Les cigarettes vendues dans les pays émergents (légales ou de contrebande) sont plus nocives que celles vendues dans les pays développés », a-t-il déclaré en précisant que les industries se tournent vers les pays en développement pour compenser leurs pertes de marché au Nord. L'industrie du tabac doit recruter chaque jour de nouveaux fumeurs pour remplacer ceux qui meurent. « L'industrie nous cible et compte promouvoir ses produits avec une croissance de la consommation escomptée de 16% pour la prochaine décennie », a-t-il ajouté. Le tabac représente une part importante dans l'économie de certains pays en voie de développement. La culture du tabac, poursuit le Pr Nafti, occupe des pourcentages importants des terres agricoles. Il précise que plus de 100 000 ha de terres agricoles sont cultivées en Côte d'Ivoire, au Nigeria et en Afrique du Sud. 5000 à 10 000 ha entre l'Algérie, le Maroc et le Kenya. Pour le développement de ces cultures, a-t-il indiqué, certains pays mènent une politique de déforestation et de détournement des terres agricoles. Pour ce qui est de l'incidence fiscale sur la cigarette, 75% vont à l'Etat (recettes fiscales), 50% au producteur, 10% au fabricant et distributeur et 10% au débitant et buraliste. Le Pr Nafti a également mis en garde contre la minimisation de l'addiction en niant que la nicotine est une drogue et en niant les risques du tabagisme sur la santé. Plus coûteux à la société qu'il ne lui rapporte. La consommation de tabac, a expliqué le Pr Nafti, entraîne au niveau mondial une perte de 450 milliards d'euros dont la moitié dans les pays en développement. « Pour prolonger d'une année la vie d'un fumeur par le sevrage, il ne faut que 25 à 45 euros alors qu'il faut 25 000 euros pour prolonger d'une année la vie d'un patient atteint d'un cancer bronchique », a-t-il signalé avant de lancer un appel en direction des pouvoirs publics afin d'instituer un contrôle sur le tabac fabriqué en Algérie par les multinationales. « Aucune information n'est communiquée par ces firmes », a déclaré le Pr Skander.