L'Irak renoue avec une de ses guerres car, il est vrai, ce pays en compte beaucoup depuis l'invasion américaine en mars 2003. Cette fois, c'est celle qui oppose miliciens chiites aux troupes irakiennes et américaines. Ces combats, que l'on appréhendait car ils renvoient à une nouvelle réalité irakienne, sont entrés, hier, dans leur cinquième jour, tout en s'étendant, tandis que le bilan s'est alourdi pour atteindre au moins 230 tués. La police a annoncé avoir lancé, avant l'aube hier, une opération contre des miliciens chiites dans la ville sainte chiite de Kerbala (110 km au sud de Baghdad), jusqu'ici épargnée par les combats. Ces nouveaux combats interviennent au cinquième jour d'affrontements entre les miliciens de l'armée du Mahdi, la puissante organisation du chef radical Moqtada Sadr, et les forces régulières, appuyées par des unités américaines. Dans le seul quartier (chiite) de Sadr City, bastion de l'armée du Mahdi à Baghdad, au moins 75 personnes ont été tuées et près de 500 blessées depuis le début des combats, selon le porte-parole des services de santé de Baghdad, Kassem Mohammed. Il a accusé les forces américaines de « créer des obstacles » pour transporter les victimes hors de Sadr City, un immense quartier populeux qui abrite au moins deux millions d'habitants et qui se trouve coupé du reste de la ville. Les combats opposent encore et toujours les miliciens de Moqtada Sadr, opposé à la présence américaine et qui conteste la légitimité du Premier ministre, Nouri Al Maliki, qu'il accuse d'être à la solde des Américains. M. Al Maliki n'a pas désigné explicitement le mouvement sadriste comme l'objectif de l'opération qu'il supervise personnellement à Bassorah (sud) et assure qu'il veut éliminer des « éléments criminels » qui terrorisent les civils. Le mouvement sadriste, qui bénéficie d'un grand soutien populaire, exige que lui soit réservé plus de pouvoir, mais le gouvernement rejette la pérennité d'une organisation paramilitaire qu'il ne contrôle pas, et celle-ci, faut-il le rappeler, n'est pas la seule, le pays en compte beaucoup. Ce face-à-face intervient alors que se profilent d'importantes élections locales, au mois d'octobre, pour désigner les responsables des provinces qui bénéficieront d'un large pouvoir et d'importants moyens financiers. L'opération de mise au pas de la milice a commencé le 25 mars à Bassorah. Hier, une frappe aérienne, attribuée aux forces de la coalition internationale, a dû venir en soutien aux troupes irakiennes au sol. Ce bombardement a fait huit tués et plusieurs blessés dans le quartier Al Baâth de la zone d'Hayaniyah (nord-ouest de Bassorah), à quatre kilomètres du centre-ville. Vendredi, un officier britannique avait indiqué que pour la première fois des appareils de la coalition étaient intervenus dans les combats à Bassorah, en menant deux missions de bombardements contre des miliciens. Mais c'est toute la sécurité, avec ses différents plans, qui en prend un sérieux coup, rendant encore plus inextricable la situation en Irak, et encore plus hypothétique un retrait américain.