Pas de trace du livre.Des quartiers entiers, des cités et îlots résidentiels n'ont pas d'espace de lecture, non pas faute de lectorat, mais d'une volonté de l'administration publique de réserver des espaces de lecture. M. Aïssa, qui animait dans un passé récent la bibliothèque Espace lecture, évoque avec amertume les 350 jeunes adhérents, éparpillés à la rue Allili, aujourd'hui dans la nature. « Il y avait même des femmes au foyer qui venaient emprunter des livres et montraient leur joie d'apprendre. » Les engagements locatifs n'ayant pu être honorés, la bibliothèque a fermé, au grand désarroi des jeunes qui iront jusqu'à chercher un éventuel local pour leur bibliothécaire. M. Aïssa révélera que pas moins de 47 cartons attendent d'être allégés de leur contenu, des livres qui devraient être alignés sur des rayonnages. « J'ai trouvé une cabine saharienne et un emplacement dans un quartier à forte concentration urbaine, avec tous les désagréments à deviner mais l'APC n'a pas voulu débourser les 36 millions de centimes nécessaires à son achat », dira l'auteur des initiatives individuelles à la rue Abdelli, où s'organisaient des rencontres avec des écrivains, notamment M. Zaoui, directeur de la Bibliothèque nationale. Nous apprendrons par ailleurs que même la petite bibliothèque communale, au centre de la ville, est devenue un service d'état civil rattaché à la commune, et les livres, là-bas également, sont entassés dans des cartons. Les jeunes de Boufarik, scolarisés ou non, sont dans la rue, errent sans but précis et « tuent » le temps avant de retrouver leur espace pour dormir la nuit. Même les salles de cinéma ont disparu : Club, Tivoli, Royal étaient des lieux de projection sans parler du Colisée. Une sécheresse culturelle totale. Zemmouri, Aïssaoui et d'autres cinéastes sont issus de cette ville mais qui s'en soucie ? Troisième ville de la wilaya après Blida et Ouled Yaïch, elle s'affirme comme seconde par ses traditions, sa culture et son histoire. Près de 80 000 habitants sans même une bibliothèque, sans salle de cinéma et un mouvement associatif parmi les plus faibles. Même le club de football local se morfond dans les profondeurs des divisions inférieures et ne draine plus cette foule susceptible d'être canalisée, orientée. Les lycées de la ville, Ibn Toumert entre autres, souffrent de cette absence d'activités culturelles extra-scolaires et de lieux de convivialité, et quand il est appris que près des 2/3 des effectifs scolarisés sont des filles, on devine aisément le désert culturel. La ville de Bougara, commune de moindre importance, vient de vivre sa Semaine du théâtre. Comment susciter l'esprit d'initiative chez des élus locaux non combatifs ? Pour les uns, c'est la timidité et l'absence d'expérience, alors que pour les autres, l'intérêt porté à ce genre de créneau est nul.