L'industrie pharmaceutique algérienne vit une situation dramatique. La production nationale risque dans un proche avenir d'être grandement fragilisée dans la mesure où l'avenir de certaines entreprises apparaît des plus incertains. Six d'entre elles ont déjà mis la clé sous le paillasson, selon le secrétaire général de l'Union nationale des opérateurs de la pharmacie (Unop), Nabil Mellah. La déclaration a été faite hier lors du forum d'El Moudjahid. L'appel aux pouvoirs publics est bien clair. Ces derniers ont d'ailleurs été appelés à engager une réflexion pour trouver des solutions urgentes pour sauver ce qui reste de cette jeune industrie. Selon l'Unop, la mise en place d'une stratégie nationale de développement est aujourd'hui urgente. Une stratégie qui ne peut être élaborée, selon son président, Amar Ziad, sans la collaboration des opérateurs de la pharmacie. Cette voie de sortie de crise devra, de l'avis de tous, tenir compte de tous les aspects liés au marché du médicament. Lors de sa présentation, le secrétaire général de cette organisation, le docteur Mellah, a relevé point par point toutes les entraves rencontrées par la production nationale freinant ainsi son essor. Il s'agit en premier lieu, a-t-il dit, de la réglementation mise en place qu'il juge « inadaptée ». Il plaide, au nom de l'Unop, pour un cadre réglementaire sûr, prévisible, transparent et stable en signalant que le secteur connaît des perturbations, entre autres, en raison de « l'instabilité au niveau de l'institution de tutelle, à savoir le ministère de la Santé. Le directeur de la pharmacie a changé, la réglementation l'est aussi à chaque fois qu'on change de ministre », a-t-il déclaré après avoir donné un bref aperçu sur les investissements réalisés en Algérie par des entreprises algériennes et les capacités de production. Ne mâchant pas ses mots, le secrétaire général de l'Unop a tenu à dénoncer le « traitement préférentiel » pour les fournisseurs étrangers par rapports aux importateurs algériens et aux producteurs. « L'enregistrement des médicaments fabriqués localement relève d'un parcours du combattant », a-t-il signalé en indiquant que « sur les 70% des parts de marché des médicaments importés, 75% sont enregistrés alors que seulement 25% des produits fabriqués localement sont enregistrés sur la part du marché de la production nationale qui est de 30%. 250 produits importés, toutes formes confondues, ont été enregistrés. Parmi lesquels de nombreux produits sont déjà fabriqués localement ». Il signale que « les capacités de production nationale ne peuvent être augmentées seulement si un enregistrement préférentiel et accéléré est accordé pour les produits fabriqués localement », a-t-il expliqué. L'Unop suggère ainsi la réservation de 500 produits essentiels à la production locale pour permettre son essor à travers l'identification de la liste, le gel de l'enregistrement de ces produits à l'importation, le gel du réenregistrement de ces produits et la suspension des programmes d'importation de cette liste. Il estime que pour encourager la production nationale, l'instauration d'un prix et d'un remboursement préférentiels pour les produits fabriqués localement, le rétablissement de la durée de vie minimale des produits à l'importation et l'application d'une forte taxation à l'importation des produits de confort sont indispensables. « La réservation prioritaire des marchés publics à la production nationale est une mesure importante qui contribuera à la préservation de l'économie nationale tout comme la responsabilisation des importateurs à travers la création d'un statut d'exploitant pharmaceutique. » Il a souligné également la nécessité de renforcer le cadre institutionnel de l'Agence nationale du médicament dont les missions devront être définies après concertation avec tous les partenaires. Quant à l'encouragement du générique, le docteur Mellah a démontré que sur le terrain, aucune mesure n'est en faveur de la promotion du générique. Il cite, entre autres, la signature obligatoire d'un engagement par les importateurs exigé par le ministère de la Santé pour l'importation de 45% de produits génériques. « Pourquoi le ministère n'a pas obligé les opérateurs à fabriquer 45% du générique au lieu de l‘importer ou bien pourquoi n'a-t-il pas décrété l'arrêt de l'importation des génériques qui sont déjà fabriqués localement ? », s'est-il interrogé en précisant qu'un écrit a été adressé dans ce sens à Amar Tou. L'Unop, a-t-il ajouté, estime que l'encouragement du générique doit passer par la mise en place des marges bénéficiaires par valeur absolue, favoriser la fabrication du générique et non son importation, l'exonération des taxes sur la promotion du générique et lancer des campagnes de promotion de génériques et l'implication du prescripteur. Maintenant, il reste à savoir, a-t-il conclu, si les instructions du président de la République seront suivies de mesures concrètes sur le terrain.