Un tableau des plus noirs a été brossé hier par les responsables du Syndicat national des praticiens de la santé publique (SNPSP) sur la situation des praticiens de manière générale et du secteur de la santé en particulier. Des milliards de dinars, selon les syndicalistes, ont été gaspillés par les gestionnaires du secteur de la santé au moment même où les chirurgiens dentistes n'ont bénéficié initialement que d'une augmentation de salaire de 200 DA. « Ceci est vrai et nous avons la preuve palpable de ce que nous avançons. Nous venons de recevoir nos fiches de paye et nous qualifions ces augmentations d'insulte à la dignité et au parcours des fonctionnaires algériens », a tonné Bensebaine Salah, président du SNPSP, lors d'un point de presse animé à Alger. Plus explicite, M. Bensebaine a rappelé les étapes effectuées pour la mise en place de ces augmentations qualifiées par tous de « leurre ». Lors de l'élaboration de la grille des salaires, explique le conférencier, les chirurgiens dentistes et les pharmaciens n'ont eu droit qu'à 200 DA de plus. Ce n'est qu'après la montée au créneau des syndicats autonomes que le tir a été rectifié, non pas par la direction de la Fonction publique, mais à travers l'intervention du chef de l'Etat qui a mis en place un décret présidentiel instaurant une prime complémentaire. « Trouvez-vous normal cette démarche ? Pour corriger l'aberration et l'injustice envers les fonctionnaires, le premier magistrat du pays a instauré une indemnité complémentaire de compensation allant de 1500 DA à 3000 DA, et ce, en faveur des fonctionnaires ayant obtenu de maigres augmentations », a déploré l'orateur, qui estime que grâce à « l'aumône de M. Bouteflika, le chirurgien dentiste et le pharmacien peuvent dire aujourd'hui qu'ils ont été augmentés de 1700 DA », a-t-il observé. Outré et déçu, le président du SNPSP exhibe les fiches de paye des praticiens dont les augmentations varient entre 1700 et 6000 DA. « Où sont les fameuses augmentations dont s'est dit enchanté à la veille de notre action de protestation M. Sidi Saïd, patron de l'UGTA. Un pharmacien ayant 20 ans d'expérience a été augmenté de 3000 DA. Ce dernier attendait depuis de longues années cette nouvelle grille des salaires. Il espérait une augmentation digne de son statut, en vain », a regretté M. Merabet, secrétaire général du syndicat. Aussi, le SNPSP rejette en bloc la nouvelle grille des salaires. En outre, il demande une revalorisation conséquente du point indiciaire. Ce faisant, les praticiens revendiquent la participation au dialogue afin d'exposer les problèmes réels du secteur. Tout en dénonçant la politique prônée par M. Tou, ministre de la Santé, M. Merabet note que celui-ci ne les a reçus que deux fois depuis son installation à la tête de ce département. « Le secteur est confronté à de multiples problèmes. M. Tou a balayé d'un revers de la main tout ce que ses prédécesseurs ont réalisé dans le cadre de la réforme. Il a procédé à la suppression des centres de santé en les remplaçant par des salles de soins et des polycliniques, sans aucune orientation », a soutenu M. Bensebaine, qui est persuadé qu'aucune réforme ne peut aboutir si le personnel n'est ni concerté, ni impliqué, ni convaincu. « Tou agit à sa guise, il ne consulte personne et notre syndicat est exclu de toutes les commissions regroupant les ministères de la Santé et celui du Travail en dépit de notre sollicitation. Le SNPSP est écarté, car il n'est pas du genre à applaudir », fera remarquer M. Merabet. Se voulant plus concrets, les responsables de ce syndicat ont révélé une aberration des plus graves. M. Tou, selon eux, a donné instruction aux directeurs de tous les établissements de santé pour l'acquisition d'un matériel d'ophtalmologie coûtant plus d'un milliard de centimes. L'aberration réside dans le fait que la majorité de ces établissements n'ont ni un service d'ophtalmologie, ni des médecins spécialistes en la matière ! « Pourquoi un tel matériel ? Pourquoi gaspiller autant d'argent alors que nos besoins formulés n'ont pas été pris en charge ? Pis encore, l'Algérie a fait appel aux Cubains pour se consacrer à la branche ophtalmologique. Ils font des interventions, ils ont acquis un matériel et ils sont rémunérés par l'Etat algérien en devises. Où va-t-on et qui tire les ficelles de cette politique ambiguë ? », s'est interrogé M. Bensebaine qui a tenu à rendre publics ces faits, car il estime que les médecins sont redevables devant le peuple.