Après 19 reports, la séance de l'élection présidentielle a permis aux Libanais d'élire leur président par les voix de leurs députés dans un Beyrouth qui a renoué peu à peu avec la normalité après 18 mois de crise ouverte. Le désormais ancien chef de l'armée, le général Michel Sleiman, 59 ans, troisième haut officier à devenir président, devra s'atteler à une tâche ardue : réconcilier les parties libanaises et apaiser les tensions qui ont pris un caractère confessionnel. Reste que les équilibres régionaux peuvent à n'importe quel moment fragiliser ce début de normalisation. Tout reste à refaire au Liban. Il aura fallu 18 mois, une trentaine de rounds de négociations, soixante morts lors des derniers affrontements pour que le Liban élise enfin un chef de l'Etat. Hier, le nouveau président du Liban, le général Michel Sleiman, élu par 118 députés, sur un total de 127, a lancé un appel à l'unité des Libanais, en prêtant serment devant les députés, peu après son élection. La première décision du nouveau président a été de considérer le gouvernement de Siniora démissionnaire en le chargeant d'expédier les affaires courantes en attendant la formation du nouveau exécutif dit d'union nationale. Le désormais arbitre des conflits intérieurs a souhaité l'établissement de relations diplomatiques avec la Syrie et la mise en place d'une stratégie de défense contre les violations du territoire libanais par Israël tout en témoignant de son attachement à la résistance menée par le Hezbollah sans le nommer explicitement. Habillé en civil, veste noire et cravate grise, le nouveau président s'est levé devant les députés après avoir reçu l'investiture du président du Parlement, Nabih Berri, un des leaders de l'opposition. « Je vous appelle, politiciens et citoyens, à entamer une nouvelle phase appelée le Liban et les Libanais, afin de réaliser les intérêts de la nation », a-t-il dit. Le général Sleiman avait auparavant demandé une minute de silence à la mémoire « des martyrs du Liban ». Puis il a promis de défendre la Constitution, la souveraineté et l'indépendance du Liban, et a appelé les Libanais à mettre de côté leurs différends afin de tourner une page dans l'histoire du pays. « Je jure par Dieu Tout-Puissant de respecter la Constitution du Liban et ses règles, je protégerai la souveraineté du Liban et la sécurité de son territoire », a-t-il déclaré. « Dans cette ère nouvelle, nous nous engagerons dans un plan national (...) par lequel les intérêts du pays seront une priorité sur les intérêts partisans et religieux », a-t-il affirmé. Il a ajouté que les armes présentes au Liban ne devaient être pointées que sur les ennemis du pays, en référence au coup de force armé effectué début mai à Beyrouth par l'opposition menée par le Hezbollah. Le nouveau chef de l'Etat a assuré qu'il chercherait à établir des relations amicales et à instaurer des relations diplomatiques avec la Syrie, l'ancienne puissance de tutelle qui soutient l'opposition libanaise et n'a pas de relations diplomatiques avec son voisin. « Nous chérissons nos relations avec les pays arabes et recherchons des relations fraternelles avec la Syrie, basées sur la souveraineté mutuelle et sur l'indépendance », a ajouté le général Sleiman. Il a affirmé que le Liban devait mettre en place une stratégie de défense afin de faire face aux violations du territoire libanais par Israël et de libérer le petit territoire frontalier des Fermes de Chebâa. « Les Fermes de Chebâa restent sous occupation en raison des menaces et des violations continuelles de notre souveraineté par Israël, nous devons élaborer une stratégie de défense nationale pour protéger le pays », a déclaré le président. Quelques minutes plus tôt, il avait été accueilli dans l'hémicycle par les applaudissements nourris de l'assistance debout. Le général Sleiman, qui était commandant en chef de l'armée depuis 1998, devient à 59 ans le 12e président du Liban. Il succède à Emile Lahoud, dont le mandat avait expiré le 23 novembre 2007, laissant le pays en pleine crise, sans chef de l'Etat.