Non seulement les troubles que connaît la ville d'Oran depuis lundi dernier à l'annonce fatidique de la relégation du club de football local le MCO en division II n'ont pas cessé mais ils ont gagné en intensité avec à la clé des dégâts qui n'ont épargné ni les édifices publics ni les biens des particuliers. Hier encore, la ville se trouvait toujours en « état de siège ». C'est la première fois dans l'histoire du sport en Algérie où les démons des stades frappent avec une telle violence et prennent en otage pendant déjà trois jours une ville et ses habitants qui ont le malheur de se retrouver sur le chemin de ces (vrais faux) hooligans. Les scènes de casse et d'agression des automobilistes à la sortie des stades font partie du décor hebdomadaire aux abords de nos stades. Mais il s'agit généralement de bandes de supporters ou souvent de jeunes qui n'ont rien à voir avec le football et qui profitent de la situation de confusion générale et de l'anonymat de la foule pour détrousser les passants et faire passer leur poussée d'adrénaline sur les citoyens et les automobilistes. La situation qui prévaut dans la ville d'Oran ne rentre pas apparemment dans ce cas de figure, celui d'un accès de fièvre passager de supporters d'une équipe de football vite maîtrisé par les forces de l'ordre. La relégation de l'équipe locale ne semble être qu'un prétexte, la goutte qui a fait déborder la coupe des jeunes oranais qui sont sortis dans la rue pour exprimer un mécontentement aux causes plus profondes dépassant le cadre sportif. Au regard de l'ampleur des troubles et de leur persistance, il ne fait aucun doute, en effet, que le mouvement qui est parti à l'origine des stades a charrié dans son sillage tous les mécontents et les déçus des promesses non tenues de Bouteflika. Ce qui se passe à Oran n'est qu'une réplique des émeutes sociales qui secouent depuis quelques mois le pays et qui se propagent comme une traînée de poudre à travers des régions supposées politiquement stables et acquises au président Bouteflika. Tant que la fronde fut circonscrite à des espaces traditionnellement rebelles et hostiles au pouvoir central à l'image de la Kabylie, le pouvoir jouait sur du velours en s'efforçant de réduire un souffle démocratique à des velléités sécessionnistes pour discréditer le mouvement. Mais dès lors que la grogne gagne des régions censées être pacifiées pour avoir porté à bout de bras la candidature de Bouteflika et apporté un soutien inconditionnel à son programme d'action, c'est qu'il y a réellement péril en la demeure, que la crise est nationale et profonde. Les solutions préconisées au plan sectoriel telle la possibilité d'instaurer un championnat à blanc pour éradiquer la violence dans le sport, ou encore le fait de promulguer des lois d'un autre âge sujettes à toutes les dérives et toutes les interprétations comme on l'a vu avec l'affaire de la jeune femme de Tiaret convertie au christianisme pour endiguer le vent de prosélytisme évangéliste qui menacerait l'islam en Algérie ne sont que des cautères sur des jambes de bois. Et si cela ne suffit pas pour taire la contestation, on sort la thèse fétiche et séculaire du complot comme l'a fait hier le ministre de l'Intérieur à propos des émeutes de Berriane et de Chlef.