Les ovations furent non seulement chargées d'enthousiasme mais encore pleines de gratitude de la part d'un public sevré de spectacles de ce niveau. Oubliez Hérostrate de Grigorie Gorine, produit par le TNA, avec une mise en scène de type classique par Haïder Benhoucine, est prenant. Et pour celui qui, comme nous l'avons vu précédemment, le charme est demeuré intact. En effet, les comédiens ont joué une barre au dessus de leur performance habituelle, avec une mention spéciale pour Laïd Kabbouche, Samia Méziane et Abelhamid Zouibie qui ont surclassé leurs partenaires, interprétant avec finesse l'intériorité de leurs personnages. Haïder, en coryphée et en costume de ville, contrairement aux autres comédiens grimés et costumés comme en l'an 356 avant J.C., les poussait à jouer à un double niveau, celui de leur réalité de comédiens et celui des personnages, ce qui a produit un troublant effet de mise en abîme. Cette intrusion de la contemporanéité réactualise le propos du mythe, soulignant le péril que représente la culture de l'oubli. « Oublier, c'est pardonner », s'exclame avec rage le coryphée metteur en scène. Le prétexte rapporte que Hérostrate, un marchand d'Ephèse qui, pour accéder à la postérité, incendie le temple de la déesse Artémis. L'ordre est alors donné pour bannir son nom à jamais. A travers le destin de Hérostrate, volent en éclats les mystifications et les cynismes des siècles passés comme ceux d'aujourd'hui. Jeudi, un spectacle écrit par Sofiane Attia et produit par Masrah Tedj, Harb Douma, a également été donné en hors compétition. Il raconte l'éternel combat entre le bien et le mal personnifiés par des marionnettes et des automates. Le lendemain, toujours dans le off, l'Afrique subsaharienne était présente avec la coopérative Bellica, une troupe guinéenne. Son spectacle La retraite évoque la dramatique situation de ceux qui vivent des poubelles des grandes cités. Traité sur le mode de la comédie légère pour atténuer la dureté du propos de l'auteur, David Djaoumanou, le spectacle a évacué une convenue approche misérabiliste. Les comédiens jouent avec une joie manifeste sur une scène nue avec juste pour soutien leurs chants et danses ainsi que d'heureuses trouvailles scéniques. Le soir, c'était au tour du théâtre régional de Batna d'entrer dans la compétition avec Faoudha El Abouab plaisamment mise en scène par Bouzid Chaouki, un vaudeville sur le mode de la parodie, du gag visuel et de cocasses situations, dans la filiation du Diplomate signé Fouzia Aït El Hadj, Morstane par Khaled Belhadj et Aoudate Houlakou par Lotfi Bensebâa.