Deux généraux proches de l'ex-président yéménite Ali Abdallah Saleh ont rejeté des ordres de limogeage ou de mutation, défiant le nouveau pouvoir intérimaire sur l'une des réformes les plus attendues, la restructuration des forces armées. Le général Mohamed Saleh al-Ahmar, commandant des forces aériennes et demi-frère de l'ex-président, a rejeté son limogeage vendredi par le président de transition Abd Rabbo Mansour Hadi, a annoncé samedi une source militaire. Démis par décret présidentiel, il a refusé de partir et ordonné à ses troupes de ne pas appliquer la décision tant que le ministre de la Défense Mohamed Nasser Ahmed et le chef d'état-major Ali al-Achwal resteraient en place, selon cette source. Des militaires sous son commandement ont provoqué la fermeture de l'aéroport international de Sanaa en l'encerclant avec des hommes armés d'une tribu restée fidèle à l'ancien chef de l'Etat, et en menaçant d'abattre tout avion volant dans la zone. "Aucun avion n'a décollé ou atterri depuis que ces militaires ont lancé leur menace vendredi soir", a déclaré une source aéroportuaire. Le gouvernement a pour l'instant gardé le silence sur ce défi, la commission militaire se contentant d'annoncer l'accélération du démantèlement des barricades, vestiges des combats entre partisans et adversaires de M. Saleh dans la capitale. Le chef du Conseil de coopération du Golfe, Abdel Latif Al-Zayani, a réaffirmé le soutien des six monarchies de la région, qui ont parrainé l'accord de transition, au nouveau président. "Le CCG soutient toutes les mesures prises par M. Hadi pour sortir le Yémen de la crise", a-t-il affirmé dans un communiqué. Le général Mohamed Saleh al-Ahmar a été limogé en même temps que le général Tarek Mohamed Abdallah Saleh, chef de la garde présidentielle et neveu de l'ancien homme fort du pays. Selon la source militaire, le général Saleh a refusé le commandement du 37ème bataillon de la Garde républicaine, basé dans la province de Hadramout (sud-est), auquel le décret présidentiel l'affectait. Les décisions du président Hadi étaient très attendues dans la mesure où la restructuration des forces armées étaient l'une des dispositions majeures de l'accord sur la transition. Pendant la révolte populaire contre M. Saleh, ces forces ont connu de profondes divisions, certains militaires soutenant le régime tandis que d'autres se rangeaient du côté des manifestants. La restructuration visait à combler le fossé afin de permettre à l'armée d'oublier ses luttes internes pour se concentrer sur le combat contre Al-Qaïda, qui n'a cessé de multiplier les attaques dans le sud et l'est du pays. Bien avant le départ de l'ex-président, le général Mohamed Saleh al-Ahmar était fortement contesté au sein des forces aériennes, où des officiers et des hommes de rang l'accusaient de corruption et de népotisme. Ali Abdallah Saleh, qui a dirigé le Yémen sans partage pendant 33 ans, a accepté sous la pression de la rue et de la communauté internationale de céder le pouvoir à M. Hadi, son vice-président, élu pour deux ans le 21 février. Mais ses détracteurs l'accusent de chercher à entraver la transition. Il garde en effet la présidence du Congrès Populaire Général (CPG, ancien parti au pouvoir), et ses proches contrôlent toujours les principaux organes de sécurité, notamment son fils aîné Ahmed, qui commande la Garde républicaine, unité d'élite de l'armée.