ONG et politiques dénoncent vigoureusement les propos du Saint-Père qui a affirmé ce mardi que l'utilisation du préservatif aggravait le problème du sida Benoît XVI fait l'unanimité contre lui ce mercredi. ONG et politiques lui tombent dessus à bras raccourcis, 24 heures après ses propos selon lesquels le problème du sida ne «peut pas être réglé» par la «distribution de préservatifs» et qu'«au contraire, leur utilisation aggrave le problème». «Très clairement ce sont des paroles gravissimes quand on voit l'impact que ce type de message peut avoir en Afrique où vivent les deux tiers des personnes séropositives», estime ainsi Béatrice Luminet, responsable de Médecins du Monde. «Ces paroles seront relayées sur le terrain et auront évidemment un impact en terme de perturbation des messages de prévention notamment sur le continent africain où le catholicisme est influent. […] Prôner l'abstinence, c'est en dehors de la réalité.» Juppé: «Ce pape commence à poser un vrai problème» Même condamnation au Cameroun, où Benoît XVI a atterri ce mardi. «Le pape vit-il au XXIe siècle?», se demande une ONG locale, le Mouvement camerounais pour le plaidoyer à l'accès aux traitements. En revanche, l'un des membres de l'organisation, Alain Fogué, ne fait pas le même diagnostic sur les effets des déclarations papales: «Les gens ne suivront pas ce que le pape dit. Il vit au ciel et nous sur terre. […] Qu'il le veuille ou non, sur 100 catholiques, 99 utilisent aujourd'hui le préservatif. Le pape doit savoir que la chair est faible. Le pape ne savait-il pas en arrivant au Cameroun que les personnes séropositives y représentent un nombre important de la population?» Côté politique en France, la secrétaire nationale du PCF et présidente du groupe d'études Sida à l'Assemblée nationale, Marie-George Buffet, s'insurge: «les paroles prononcées par le pape pour inaugurer son premier voyage sur le continent africain peuvent être qualifiées d'irresponsables et de criminelles.» Le président de l'association Elus locaux contre le sida, Jean-Luc Romero, est, lui, «totalement scandalisé et sidéré par les déclarations du Pape» et considère qu'il s'agit d'«un message de mort adressé aux Africains». Quant à Alain Juppé, il rue dans les brancards et assure que «ce pape commence à poser un vrai problème», car il vit «dans une situation d'autisme total». Au-delà de la polémique sur le préservatif, le maire de Bordeaux a évoqué la réintégration d'évêques «dont l'un est l'apôtre - si j'ose dire - du négationnisme» et l'affaire de l'excommunication de la mère d'une fillette violée au Brésil. Mgr Di Falco pointe «les raccourcis médiatiques» Seul contre tous, l'évêque de Gap, Jean-Michel Di Falco, a, lui, tenté de se porter au secours du Pape. Selon lui, Benoît XVI n'a fait qu'exprimer «l'idéal» catholique de fidélité et d'abstinence. Cela dit, quand il déclare que l'utilisation de préservatifs «aggrave le problème», «on peut dire que c'est la phrase de trop, estime le prélat, parce que dans les raccourcis médiatiques ça ne lui permet pas vraiment de s'expliquer». Et Mgr Di Falco d'endosser le rôle d'exégète en sus de celui d'avocat. Voici, d'après lui, ce que le Saint-Père avait en tête: «Je pense qu'il a voulu dire que ce n'était pas suffisant mais qu'il devait y avoir derrière de l'éducation, de la responsabilisation. […] Malheureusement dans certains pays d'Afrique parce qu'ils n'ont pas les moyens de se procurer les préservatifs, ils vont les utiliser plusieurs fois ou à plusieurs. Mais le pape ne peut pas entrer dans tous ces détails et c'est vrai que cette phrase paraît brutale et ne pas tenir compte de la réalité de ce qui se vit en Afrique ».